Nous appelons Alexis De Suremain le matin, il nous fait une place dans son emploi du temps pour l’après-midi. Rendez-vous à La Plantation (nous apprendrons plus tard qu’il s’agit du dernier hôtel acheté en date), un peu intimidés par la modernité et le chic de l’endroit, nous attendons qu’il arrive. Après quelques minutes de présentation, il commence à nous raconter son parcours :
My Little Big Trip : Qu’est-ce qui t’as poussé à venir vivre et entreprendre au Cambodge ?
Alexis : J’ai toujours voyagé. Je suis fils d’expatriés donc j’ai commencé à vivre à l’étranger à l’âge de 1 ans. Je bougeais tous les 3-4 ans jusqu’à mes 25 ans environ. A cet âge, j’ai choisi d’aller travailler en Russie. J’avais déjà vécu là-bas étant petit et je parlais russe. J’ai monté une agence de voyage et un bureau de représentation pour conseiller les français qui veulent venir en Russie
MLBT : En quoi cela consistait-il ?
Alexis : A l’époque, en 1992, la Russie vivait ses premières années post-communistes. Il y avait une méconnaissance de la Russie. Avant l’implosion de l’URSS, les centrales d’achat de l’Union géraient tous les flux de marchandises. Quand l’URSS est tombée, plus rien ne régulait les flux, les stocks etc. C’était le chaos. Ça a duré entre 2 et 3 ans. Je m’occupais de faire connaitre la Russie et son fonctionnement auprès de la France. Nous avons également développé le centre culturel français. C’était une période très enthousiasmante. Je l’ai fait pendant 3,5 ans.
MLBT : Quelle a été la seconde étape ?
Alexis : Suite à un concours de circonstances, je sympathise avec l’ami d’un de mes cousins éloignés qui travaillait pour Pharmaciens Sans Frontière. Il m’explique qu’il travaille en Asie Centrale et je trouvais ça génial. Il m’a dit qu’ils cherchaient un logisticien pour l’Asie Centrale et il se trouve que je correspondais parfaitement au poste. Je parlais russe, je connaissais le système de comptabilité en Russie, je connaissais l’Asie Centrale puisque j’y avais fait un trip de plusieurs mois. Ils m’ont engagé tout de suite.
MLBT : Incroyable, tu as travaillé combien de temps pour eux ?
Alexis : Près de 8 ans. J’ai commencé par des missions vraiment terrain où on livrait des médicaments dans des coins ultra reculés. On faisait des formations. Ensuite j’ai participé à l’ouverture de bureaux où il y avait énormément de travail administratif. J’ai été chef de mission également. J’ai travaillé pour eux au Tadjikistan, au Kirghizstan, en Moldavie et j’ai terminé au Cambodge. Ça s’est terminé suite à un changement de direction que je n’approuvais pas et qui changeait les valeurs de Pharmaciens Sans Frontière.
MLBT : C’est à ce moment que tu as décidé de t’installer au Cambodge ?
Alexis : J’ai d’abord travaillé un an pour Médecin Du Monde. Ça a été un grand honneur pour moi de travailler pour eux. Ensuite, j’ai voulu me rapprocher de ma femme et de mes enfants qui étaient restés au Cambodge. Entre temps, je m’étais marié et j’avais eu des enfants.
MLBT : Et comment es-tu passé de missions pour Pharmaciens sans Frontière ou Médecins sans frontière à un business lucratif comme monter des hôtels ?
Alexis : Ma femme avait monté une marque de vêtements appelée Elsewhere. Au fur et à mesure, le magasin s’est transformé en café, restaurant et bar. Ma femme avait lancé un nouveau concept, le First Friday Party qui, comme son nom l’indique, était une grosse soirée organisée tous les premiers vendredi du mois. C’était devenu une institution. Ensuite, nous avons eu l’opportunité de monter un hôtel. Notre premier hôtel a été Le Pavillon, on avait 10 chambres. La maison d’à côté s’est libérée et on a agrandi. Et ça s’est passé comme ça pour tous les hôtels. Aujourd’hui je gère 150 chambres et il y en aura probablement 200 en janvier 2013.
MLBT : Tu es tout seul à chaque fois sur les affaires ?
Alexis : Non j’ai des associés.
MLBT : Ça semble très facile de monter son hôtel quand tu l’expliques.
Alexis : Oui c’est facile. Maintenant ça demande quand même de bosser, de chercher le local, le meilleur emplacement, faire les travaux etc. On voit pleins de personnes qui arrivent ici en ce disant que c’est un jeu d’enfants et qui sont étonnés lorsqu’il y a un minimum d’efforts à fournir. Il faut tout de même trouver un concept, un lieu. Il n’y a pas d’approximation possible. D’autant plus que, lorsque nous sommes arrivés et que avons lancé le premier hôtel de charme, nous étions les premiers à faire ça. Aujourd’hui, la concurrence est rude. Il faut trouver l’idée originale et étudier le marché, son évolution, ses concurrents. L’emplacement est la clef. Nos hôtels s’adressent aux touristes. Ils sont donc situés à côté du Palais Royal. Le Cambodge se stabilise, ça attire beaucoup de monde et même des grosses chaînes comme par exemple le Sofitel.
MLBT : Donc la clef est de trouver une idée originale, ne pas avoir l’illusion de la facilité et surveiller son marché ?
Alexis : Exactement. L’idéal est aussi de se diversifier pour ne pas avoir tous ses œufs dans le même panier.
Bravo c’est très courageux! je suis expat en malaisie et je me rend compte les difficultés que vous avez pu traverser… pour info… je viens de réserver votre hôtel a siem repas pour chinese new year..