Cyndie est française et vit en Australie. Elle a monté Europe in a Box, une start-up qui propose de souscrire à un abonnement de coffrets culinaires surprises !
My Little Big Trip : Bonjour Cyndie, comment en es-tu venue à t’expatrier en Australie ?
Cyndie : Pour être honnête j’ai beaucoup voyagé et vécu à l’étranger avant d’arriver en Australie. La première fois, je suis partie vivre au Maroc pendant 4 mois en 2005 dans le cadre de mes études. A l’époque, j’étais à Sup de Co Montpellier. J’étais un peu anxieuse au début mais ça s’est super bien passé et j’ai eu envie de repartir. J’ai donc cherché mon stage de fin d’études à l’étranger. J’ai eu une opportunité à Londres et je suis restée là-bas 3 ans.
Quelques mois après mon arrivée j’ai rencontré Chris, mon copain actuel qui est australien. D’où le lien avec l’Australie. Après 3 ans à Londres, la crise financière a commencé et on a décidé d’aller vivre en Australie. Nous sommes d’abord passés par le Japon, à Tokyo, durant 7 mois. Vivre en Asie me tenait à cœur, j’avais toujours rêvé d’y travailler et c’était le moment de le faire. Le Japon était le pays où on pouvait tous les deux avoir un visa vacances-travail. J’ai enseigné le français pendant presque toute la durée du séjour et en octobre 2009 on est allés en Australie pour s’installer à Sydney.
MLBT : Quel genre de travail recherchais-tu ?
Cyndie : Lorsque je suis arrivée, je ne savais pas trop quoi faire, je voulais changer de branche. En Angleterre je travaillais dans un cabinet de recrutement. Ça ne m’a pas du tout plu. Ensuite, au Japon, j’ai enseigné le français, ce qui n’avait rien à voir. Quand je suis arrivée en Australie c’était le moment pour moi de changer de voie. J’ai eu beaucoup de chance parce que j’ai trouvé mon job au bout de 3 semaines. Je faisais de la gestion de projet et des risques dans le conseil et j’ai adoré ça.
MLBT : Quelles sont les différences culturelles que tu retrouves au travail ?
Cyndie : Il y a de grosses différences! C’est vrai que je suis très habituée à la culture australienne et j’aurais du mal à travailler en France pour plusieurs raisons. Déjà, je n’ai pas beaucoup d’expérience en France en dehors de mes stages donc je manquerais de vocabulaire professionnel. En plus, le style de communication est différent. Dans les cultures anglophones il n’y a pas de vouvoiement, on appelle les gens par leur prénom mais, attention, on ne se fait pas la bise (rires) ! Je trouve que les gens sont beaucoup plus abordables et les rapports sont simplifiés.
Au début lorsque j’ai commencé à travailler en Angleterre et en Australie, ça me faisait bizarre parce que j’avais l’impression de leur manquer de respect. Mais si j’avais écrit « Cher Mr Martin » je serais passée pour une idiote. Globalement c’est plus relax, moins formel. Ici les gens sont plus optimistes qu’en France.
MLBT : Nous avons cru comprendre que tu avais monté ton entreprise, peux-tu nous en parler ?
Cyndie : En parallèle à mon emploi, j’ai lancé une start-up qui s’appelle Europe in a Box. C’est un coffret surprise basé sur le principe d’un abonnement. C’est comme un abonnement pour un magazine sauf qu’à la place d’un magazine on reçoit un coffret surprise. C’est une tendance très répandue aux États-Unis et ça commence en France depuis septembre 2012. En Australie, ça n’existait pas du tout avant que je me lance et je me suis dit qu’il y avait un créneau à prendre.
MLBT : A quelle fréquence livres-tu tes coffrets et à quel prix ?
Cyndie : Tous les mois j’envoie à mes abonnés des coffrets culinaires européens. On a choisi de se situer sur du haut de gamme. La cible est constituée de personnes qui veulent découvrir la culture européenne ou qui veulent voyager par le biais de la nourriture. On veut proposer une expérience culturelle et culinaire en même temps parce que les australiens sont très portés sur la cuisine. Il y a énormément d’émissions de cuisine en Australie.
L’abonnement est à 50$ par mois. Ça peut sembler cher pour des français mais ça ne l’est pas vraiment pour l’Australie quand on connait les salaires.
MLBT : Est-ce que l’abonnement est obligatoirement?
Cyndie : Non, ils peuvent choisir de se faire livrer juste une boîte pour tester. Dans ce cas, ils recevront le coffret du mois, sinon ils peuvent s’abonner pendant 3 mois ou 6 mois. Et tous les mois la boîte est différente.
MLBT : Combien as-tu de clients ?
Cyndie : La société à 1 mois et demi donc je ne suis qu’au deuxième coffret. Pour le moment j’ai eu 25 abonnés pour la 1ère boite. Parmi ces abonnés, il y en a qui ont souscrit pour 3 mois ou 6 mois. C’est un gros avantage pour moi car ça me permet de prévoir mes ventes et mes livraisons. En plus, comme ils paient à l’avance ça me permet de ne pas devoir avancer les frais. Ça limite les risques.
MLBT : Qu’en est-il des démarches administratives quand on veut entreprendre en Australie?
Cyndie : Déjà, il faut savoir que j’ai la résidence permanente grâce à mon copain donc j’ai le droit de m’enregistrer en tant que société. L’avantage de la résidence permanente est qu’elle te donne les mêmes droits que les australiens, la seul différence est qu’on ne peut pas voter.
Globalement, c’est assez simple de monter une entreprise en Australie. Bien entendu, il existe plusieurs structures juridiques donc il faut faire des recherches pour savoir ce qui est le plus adapté à son projet. Tout se fait sur internet et il faut compter 1 ou 2 jours pour l’enregistrement. C’est difficile de donner des délais exacts parce que tout dépend de ton business plan, site internet etc. En ce qui me concerne, j’ai commencé les démarches en novembre, mois où je me suis enregistrée et j’ai fait une étude de marché. La société a été lancée le 6 février 2013.
MLBT : As-tu gardé ton travail précédent ?
Cyndie : Je travaille à temps plein dans ma société et je considère plutôt Europe in a Box comme un passe-temps. Si ça marche je pourrai envisager de me mettre à plein temps mais j’hésite. Ces six/sept dernières années ont été très difficiles pour moi car il m’a fallu acquérir une expérience dans un milieu anglophone. Aujourd’hui j’ai un travail à responsabilités et une bonne position dans l’entreprise. Pour le moment je n’ai pas envie d’abandonner cette stabilité durement acquise.
MLBT : As-tu fait beaucoup d’efforts d’intégration ?
Cyndie : Pour moi les années les plus difficiles ont été celles passées à Londres. Mon niveau d’anglais était un niveau scolaire et j’ai vraiment eu du mal tant au niveau professionnel que social. Heureusement, j’avais mon copain qui est australien et qui m’a vraiment aidé à progresser. Je travaillais dans une entreprise française à Londres et j’étais en charge du marché français. Il y avait donc beaucoup de français autour de moi et je n’ai pas progressé aussi vite que j’aurais voulu. J’ai eu beaucoup de difficultés à m’intégrer. Comme mon copain était australien, ses amis étaient australiens aussi. Du coup, ils avaient du mal à me comprendre à cause de mon accent ou je ne comprenais pas leur sens de l’humour. Les références culturelles ne sont pas les mêmes et on n’apprend pas le langage familier à l’école. Il est très facile se sentir exclu. Ça prend du temps de réussir à se dire que si les gens comprennent tant mieux, s’ils ne comprennent pas, ce n’est pas grave.
Donc quand je suis arrivée en Australie, le gros du travail était déjà fait. En plus mon entreprise actuelle est très multiculturelle, ça m’a vraiment aidé à prendre confiance en moi. Je me suis rendue compte qu’on me comprenait et qu’il n’y avait pas de problème (rires).
MLBT : Comment gères-tu l’éloignement familial ?
Cyndie : Je pense que plus tu passes de temps à l’étranger, plus c’est facile. En ce qui me concerne , je me suis éloignée petit à petit avec mes différentes expériences et j’ai des parents très compréhensifs. Il faut garder en tête qu’on n’a rien sans rien et que lorsqu’on veut quelque chose, il faut savoir faire des sacrifices. Je trouve que la qualité de vie ici est vraiment exceptionnelle. On n’a pas de problèmes de criminalité, de crise ou de chômage et j’ai des opportunités professionnelles que je n’aurais pas eues ailleurs.
MLBT Comment vois-tu la situation en France ?
Cyndie : Quand je vois la situation en France ça ne me donne pas envie de revenir et je ne me vois pas revenir avant au moins 10 ans. La France me manque beaucoup, la culture, l’histoire, la gastronomie… Je pense que j’en profite beaucoup plus lorsque j’y suis. Ce sont des choses qui nous semblent acquises lorsque l’on vit en France. C’est triste mais on les apprécie beaucoup plus quand on ne les a plus.
En plus de tout ça, je ne pense plus de la même façon. J’ai l’impression que les gens ne font que se plaindre en France, que tout va mal, que la vie est pourrie mais ils ne font rien pour changer. Les gens me disent que j’ai trop de chance mais ce n’est pas arrivé tout seul ! J’ai fait beaucoup d’efforts pour en arriver là où je suis. Moi aussi j’avais peur de partir et de tout quitter. Un moment donné j’ai fait un choix, j’ai décidé de me bouger et de prendre ma vie en main. C’est un choix qui m’a demandé beaucoup de travail et beaucoup de sacrifices. Ça ne tient qu’à eux d’aller de l’avant.
Cyndie : Quel conseil pourrais-tu donner aux gens qui envisagent de s’expatrier en Australie en famille ?
Cyndie : Je pense qu’avant d’envisager une expatriation en Australie il y a deux choses : premièrement le visa et deuxièmement la langue. Ce n’est pas simple d’obtenir un visa surtout quand on a une famille. Et si on ne parle pas anglais c’est très difficile. Il faut être réaliste et bien se renseigner avant de quitter son pays.
Les gens veulent trouver du travail en Australie depuis la France mais ça ne fonctionne pas de la même façon. Ici les choses bougent très vite. Quand tu réponds à une offre d’emploi, tu peux avoir l’entretien le lendemain et commencer la semaine suivante ! C’est une grosse différence culturelle. Je pense qu’il y a peu de chance de trouver de la France et que ça ne sert qu’à perdre son temps et à se décourager. L’employeur n’appellera pas en France. Tu as peut-être une chance si ton entreprise française te propose un poste à l’étranger. Avec une famille, je pense que j’envisagerais une expatriation plus proche.
MLBT : Pourquoi les gens veulent venir s’installer en Australie à ton avis ?
Cyndie : Je pense que l’image véhiculée par la France est assez idyllique, les surfeurs, le soleil, la plage etc. Et c’est vrai que le cadre de vie est super. J’estime que j’ai eu de la chance et je suis reconnaissante à la vie de m’avoir donné les opportunités que j’ai eues. Attention, ce n’est pas parfait non plus.
MLBT : Qu’entends-tu par-là ?
Cyndie : L’Australie est très isolée. J’adore voyager et c’est une chose à laquelle j’ai dû renoncer parce que j’ai 4 semaines de congés par an et je les garde pour revenir en France. Je pourrais prendre des jours de congés sans solde. C’est quelque chose de toléré mais les gens ne le font pas beaucoup sauf s’ils veulent faire un long voyage. Partir 3 mois en Europe par exemple. Dans mon entreprise je peux « acheter » 2 semaines de congés par an. Ça veut simplement dire que je ne suis pas payée pendant 2 semaines.
MLBT : Et concernant les horaires ?
Cyndie : On travaille un peu plus car on fait de 37 à 40h par semaine et pas 35h. Mais ici je trouve souvent que c’est plus flexible, quand tu as fini tu peux partir car ça veut dire que tu es efficace. J’ai l’impression que les gens sont plus tolérants et ouverts d’esprit. C’est moins formel, en réalité les gens ne comptent pas vraiment les heures. L’avantage c’est que le taux de chômage est bas donc si tu en as marre tu peux partir. Pour vous donner une idée, le préavis est d’une semaine et ça va jusqu’à un mois maximum en fonction du poste et des responsabilités.
MLBT : Aurais-tu un conseil à donner aux gens qui pensent à l’expatriation en Australie ?
Cyndie : Je pense que le visa est ce qu’il y de plus important. Si on parle à une personne qui a moins de 31 ans, je lui dirais de prendre le WHV et de foncer. Le WHV est une contrainte au niveau du temps de mission mais 6 mois ça te laisse le temps de faire tes preuves. J’en ai été témoin plusieurs fois. J’ai connu des gens qui ont travaillé deux mois et l’entreprise a voulu les sponsoriser. Le mieux est de trouver un poste en CDD et généralement le poste se transforme en CDI. Au bout de 6 mois, si tu as bien bossé on te garde parce que l’Australie manque de main d’œuvre qualifiée. L’employeur ne voudra donc pas perdre quelqu’un qui a de la valeur. Si tu as réussi à mettre un pied dans l’entreprise, tu as de grandes chances de rester.
MLBT : Quelles sont les qualités de recherchées ?
Cyndie : Je trouve qu’en Australie, les gens ne s’intéressent pas vraiment au diplôme mais plutôt à la personnalité. Ici, ça fonctionne beaucoup sur la méritocratie. Si tu es motivé, que tu as de la personnalité, une expérience et un diplôme, l’opportunité se présentera. Il y a beaucoup d’opportunités! Si tu as un bon niveau d’anglais et un visa, tu auras un boulot dans les deux mois. Bien sûr, plus tu as d’expérience plus tu auras d’opportunités. La personne qui a juste un stage de 6 mois aura plus de mal. Mais on peut monter très vite ici donc ce n’est pas gênant de commencer bas.
MLBT : Est-ce que si on fait un projet personnel ça peut être considéré une expérience professionnelle ?
Cyndie : Je pense que oui, ça susciterait beaucoup d’intérêt de la part des entreprises, surtout si tu arrives à le mettre en valeur en entretien. Il faut être capable de montrer ce que tu en as retiré, tes compétences etc. Ici, on met vraiment en valeur l’esprit d’initiative, surtout pour les passionnés. Les gens créatifs sont très bien vus. Je pense qu’il faut savoir se différencier des autres, sinon pourquoi on te choisirait toi ? Créer un projet, et être capable de le vendre ça ne peut être que positif!
Bonjour Cyndie,
J’espere que tout va toujnours bien pour toi. Je vis moi-meme a Sydney depuis 3 ans avec mon mari aussie :). J’ai trouve ton idee d’entreprise innovante et creative, et suis un de tes nouveaux followers on linkedin! Je voulais t’ajouter a mes contacts linkedin, mais je na’i ni ton nom de famille, ni ton adresse. Peut-etre pourrais-tu m’ajouter? Linkedin profile: Karine Buron Tobin.
Merci d’avance!
Karine