Sandra : De PVTiste à permanente

Nous sommes à Perth. Sandra Giry nous reçoit chez elle. Elle est en plein déménagement car elle a trouvé un job à Sydney. Elle nous raconte comment elle a réussi à s’intégrer et à trouver un travail en Australie. Ça lui aura pris deux ans et beaucoup d’efforts, d’énergie, et de persévérance.

MLBT : Bonjour Sandra, peux-tu nous expliquer ton parcours ?

Sandra : J’ai fait l’IDRAC, une école de commerce à Lyon J’ai terminé mes études par un stage en chef de produit marketing chez Johnson & Johnson. Trois mois après la fin du stage, on m’a appelé pour me proposer le poste en CDI. J’ai eu beaucoup de chance. Peu de gens accèdent à un poste marketing directement après l’école et sans passer par la vente.

Je me suis énormément investie. C’était un travail très prenant. J’étais en déplacement très régulièrement la semaine et une partie de mes week-end. Je ne comptais pas mes heures. Mon métier et mon poste évoluaient beaucoup. Je travaillais dans une grosse boite américaine avec tout ce que cela comporte : moyens, opportunités et travail acharné.

Sauf qu’après 6 ans dans ce travail, je n’avais pas de vie personnelle. Je n’étais jamais là. Je gagnais très bien ma vie mais j’étais seule. Ça commençait à me peser. Professionnellement, le climat devenait très lourd à cause d’une réorganisation et j’avais le sentiment d’avoir fait le tour de mon job.

MLBT : Quel a été l’élément déclencheur ?

Sandra : L’approche de mes 30 ans et un souci de santé m’ont fait prendre conscience de pas mal de choses. Ça faisait un moment que je voulais partir en Australie. Je me suis dit que c’était le moment. Je suis allée voir mon DRH et j’ai demandé un congé sabbatique de 11 mois. Il a accepté sans problème.

MLBT : Pourquoi as-tu décidé de partir en Australie ?

Sandra : Je voulais parler anglais, je voulais être bilingue et je voulais que mon voyage ait une plus-value. L’Afrique du sud me tentait mais c’était compliqué en termes de climat social. Au Canada, il fait trop froid. J’avais déjà visité l’Europe et ma sœur vivait en Australie. Elle bougeait tous les deux ans et allait bientôt partir. C’était l’occasion.

MLBT : Comment tu tes organisée ?

Sandra : Je ne me suis pas du tout préparée. J’ai vendu mes affaires et je suis arrivée chez ma sœur avec mon sac à dos. Je suis restée à Sydney chez ma sœur pendant 3 mois et je suis partie voyager. J’ai pris un avion pour Perth et j’ai visité toute la côte WA du nord au sud en van. Je passais beaucoup de temps dans la nature. C’est à cette période que j’ai rencontré mon partenaire actuel.

MLBT : Combien t’as coûté ton voyage?

Sandra : Concernant mon budget, je suis arrivée avec 15 000 euros pour la première année. Je voyageais dans un van que j’ai décidé de louer parce que je partais seule et que je n’y connaissais rien en mécanique.  Ça m’a coûté 50 dollars par jour. Avec un van en location on est plus serein sur la qualité du matériel parce que l’agence est censée tout vérifier.Ce qui est génial en Australie, c’est que les gens sont super sympas. Une fille peut vraiment voyager seule sans avoir rien à craindre.

MLBT : A quel moment tu as décidé de rester?

Sandra : C’était 3 mois avant la fin de mon visa. J’ai décidé de rester avec mon partenaire. Je suis donc allée travailler dans un vignoble pour pouvoir renouveler mon visa. J’ai eu pas mal de problèmes. J’ai dû quitter le pays à la fin du premier visa car je m’étais trompée en envoyant ma deuxième demande trop tôt. Quand je suis rentrée à Perth, je voulais trouver un travail en marketing. J’ai cherché du boulot pendant 4 mois. Je n’avais aucune réponse, même pas un entretien! Pourtant j’avais un bon CV avec une expérience dans grande entreprise très connue ici.

MLBT : Quels sont les outils à connaître pour trouver du travail ici?

Il faut chercher sur des sites internet comme : carrerone, mycareer, seek etc. Et postuler à toutes les agences de recrutement car ici il est très rare qu’un poste ne soit pas géré par une agence. En ce qui me concerne j’avais aussi cherché dans toutes les entreprises françaises implantées en Australie. J’avais contacté la Chambre de Commerce et Expat United. J’ai tout essayé. Et à chaque fois qu’on allait en soirée, je prenais des contacts et je distribuais mon CV.

MLBT : Comment tu ten es sortie ?

Sandra : J’ai eu la chance de rencontrer quelqu’un qui était en marketing et qui était d’accord pour me recevoir et regarder mon CV. Il m’a dit que j’avais un super profil, un super niveau d’anglais et une super expérience mais que le problème était probablement le Working Holidays Visa étant donné que ce visa ne permet pas de travailler plus de 6 mois pour le même employeur.

A partir de ce moment on a fait les démarches pour être conjoints de fait. Ça s’appelle le « partner visa ». Il coûte 4000 dollars et le processus est très lourd. On a mis 6 mois rien que pour faire le dossier. En attendant, j’ai pris un petit job.

MLBT : Quand est-ce que tu as eu ton visa  ?

Sandra : J’ai eu mon visa en octobre et je me suis remise à la recherche d’un boulot en marketing. Je me disais que c’était ma dernière chance. Finalement, fin octobre, j’ai vu que Johnson & Johnson recrutait. J’ai appelé le responsable recrutement, il m’a dit qu’il avait un poste de disponible en marketing à Melbourne ou Sydney. C’était le même poste que celui que j’avais en France. J’ai tenté le coup.

En tout j’ai eu 7 entretiens, 2 par téléphone, 1 conférence téléphonique et je suis allée 3 fois à Sydney et une fois à Melbourne. J’ai appris il y a deux semaines que j’avais le job et là on part à Sydney. C’était un soulagement et une fierté parce qu’on était 5 finalistes et que j’étais la seule étrangère. En plus c’est une nouvelle vie qui commence, on va prendre un appart à deux. La coloc ce n’est pas toujours facile à gérer quand on est en couple.

MLBT : Effectivement, on a l impression que tout le monde vit en colocation ici.

Sandra : Oui, ici, pratiquement personne ne vit seul parce que ça coûte trop cher. Dans nos amis, tout le monde vit en coloc.

MLBT : Comment ça se passe lintégration des français en Australie ?

Sandra :jà, il faut savoir que le backpacker  français donne une très mauvaise image des français. Quand on est intégré on voit qu’on est traités différemment par les australiens. Il faut savoir que pour la plupart, ils n’ont jamais voyagé en dehors de Fidji et Bali et dans leurs hôtels 5 étoiles. Une bonne partie d’entre eux n’a même pas voyagé dans son propre pays. Donc ils ne sont pas ouvert d’esprit et le racisme ne concerne pas uniquement les français, ils sont anti-tout étranger. Il y a aussi un racisme australien/aborigène qui est très fort et qui est choquant. Parfois on a l’impression d’être en apartheid. Pour vous donner un exemple, la dernière fois, il y a une maison qui s’est fait cambriolé dans le quartier. Les premières personnes  que la police est allée voir ont été les aborigènes!

Dans le cadre du travail, il y a un protectionnisme très fort. On se rend compte que tu as beau être bon dans ton domaine, on ne te proposera rien. Tu passeras toujours après les australiens.

MLBT : Comment tu gères l’éloignement de ton pays ?

Sandra : La distance est parfois très dure à gérer. Il y a des choses que j’adore ici mais il y a des choses qui me manquent terriblement comme les amis, la famille, et certains produits alimentaires comme le pain, le fromage, le fois-gras... Pour moi émotionnellement c’est une sinusoïde. Parfois je suis au creux de la vague et parfois je suis au top. La France me manque mais je sais que c’est la vie d’expatrié. Par exemple, ma meilleure amie vient d’avoir un bébé et je n’étais pas là, je n’ai jamais vu ma nièce qui vient d’avoir un an, des exemples comme ça, je pourrais vous en donner des dizaines.

MLBT Quels sont les points positifs de l’Australie?

Sandra : Ce qui est cool ici c’est qu’ils ont un confort et une hygiène de vie que l’on n’a pas en France. Ça s’explique par leur situation économique, ils sont dans leur bulle. Parfois je les envie parce que très peu de pays dans le monde ont la chance d’avoir une bulle dorée comme eux. Ils sont relax et de bonne humeur, ils te demanderont toujours comment tu vas.

Et surtout, ici, je me sens libre ! Les gens sont adorables, ils t’aident, tu peux t’habiller comme tu veux, tu n’as rien à craindre. En France il y a une violence et une tension permanentes qu’on ne retrouve pas en Australie. Ici je n’ai pas peur de ce qui peut arriver.

MLBT : Comment on fait pour sintégrer ici?

Sandra : C’est une bonne question. Ce n’est pas plus facile en Australie qu’en France. Ils se connaissent tous depuis l’école et ne s’ouvrent pas facilement. Après, il est possible  de s’intégrer puisque tous les français que je connais sont très bien intégrés. Pour moi c’est le problème des pays modernes. Malgré les réseaux sociaux et les nouveaux moyens de communication, il est très compliqué de rencontrer des gens. Je pense qu’il faut passer par le travail ou par une activité sportive mais pas par les soirées. Les soirées c’est entre amis, tu ne rencontres pas vraiment de nouvelles personnes.

MLBT : Quel conseil donnerais-tu aux gens qui pensent partir en Australie?

Sandra : La première chose c’est de ne pas faire son français typique. Si tu pars t’expatrier quelque part c’est parce que tu veux quelque chose de différent. N’essaye pas de retrouver la France partout où tu vas en te disant : « en France ce n’est pas comme ça, en France on fait de cette manière là etc.« . Ne râle pas, ne juge pas. Et ce, quel que soit le pays! Si tu pars c’est que tu veux découvrir une nouvelle culture, un nouveau mode de vie !

Je pense qu’il ne faut pas avoir peur de parler. Les gens sont contents quand tu parles anglais. Ils ne parlent pas d’autres langues donc ils voient que tu fais un effort. Il faut essayer de s’intégrer.

MLBT : Que dirais-tu à ceux qui pensent quils vont énormément s’enrichir en venant ici?

Sandra : Arrêtez de rêver ! Il y a beaucoup d’argent en Australie Occidentale mais c’est réservé aux australiens ! Peut-être qu’ici c’est un eldorado mais moi je ne le connais pas. Je pense que tu peux faire ta place n’importe où si tu te bouges ! Il faut persévérer et ne pas baisser les bras. Il faut pousser les portes mais c’est pareil en France. On est une génération à qui on a vendu du rêve. On n’a pas le sens du travail et de l’effort. On est la génération à qui on dit qu’on aura tout tout de suite et sans effort. Je pense qu’il faut bosser, se donner et si tu persévères il y a une porte qui va s’ouvrir.

Si j’avais un conseil à donner ce serait : ouvre-toi à la différence. Tu ne peux pas découvrir un pays si tu ne fais que regretter le pays dans lequel tu es. Et aussi, arrêtez de croire au père noël!

           Maxence Pezzetta 

Category: Expatriés
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4 Responses
  1. Anais says:

    Merci pour ce témoignage très intéressant. Pour ma part je suis actuellement en Thaïlande et j’ai un billet pour l’Australie en septembre 2014. Je crois que je vais essayer de chercher un peu du travail avant de partir avec la possibilité de faire un PVT « au pire »… On verra bien !

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