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Entreprendre à Montréal : Lucas Rivoire

Lucas Rivoire est un français arrivé à Montréal avec sa conjointe. Il a décidé de monter son entreprise et entreprendre au Canada après avoir eu une première expérience de travail en entreprise à Montréal.

MLBT : Quelle est ton parcours scolaire ?

Lucas Rivoire : J’ai fait TEMA une école de commerce orientée sur les nouvelles technologies à Reims Management School (qui vient de fusionner avec Rouen, avec un nouveau nom NEOMA Business School).

MLBT : Quelle est ton activité professionnelle à ce jour ?

LR : Je suis le fondateur des sites Internet Hotel-in-Montreal.com et  AllYouCanPost.com

MLBT : Comment en es-tu arrivé à être à ton compte au Canada ?

LR :Avant d’arriver au Canada j’ai travaillé pendant plusieurs années dans différentes start-ups. Après ma première expérience pro au Québec j’ai décidé de me lancer, cela faisait longtemps que j’avais envie de monter mes propres projets.

MLBT : Peux-tu nous en dire un peu plus sur ton site d’hôtels à Montréal ? (Comment t’est venue l’idée ? En quoi il est différent d’autres sites etc.)

LR : Ayant pas mal voyagé, nous réfléchissions à comment répondre à un besoin simple des voyageurs « comment trouver le bon hôtel ?».

Avec Hotel-in-Montreal.com nous voulons nous positionner à l’inverse de tous les autres sites « généralistes » comme LE site spécialiste des hôtels à Montréal. Notre mission est de guider les internautes afin de les aider à choisir le bon hôtel à Montréal et pas juste en proposant une liste de critères ou de prix.

Nous collaborons avec un journaliste français, expérimenté, et passionné de voyage pour créer du contenu de qualité, engagé, avec une vraie opinion. Nous avons effectué un vrai reportage sur chacun des hôtels que nous avons listés.

MLBT : Avais-tu déjà voyagé avant ? Si oui, où et combien de temps ?

LR : J’ai toujours beaucoup aimé voyager, je suis allé au Guatemala, en Grèce, aux Etats-Unis, en Egypte, en Russie, en Hollande,  au Maroc, au Monténégro, au Sri Lanka…

J’ai aussi vécu à l’étranger, 1 an à New-York et 3 ans à Madrid.

Puis avec ma fiancée nous avons décidé de partir (de Paris) vivre à Montréal. Nous avons commencé notre périple par un gros voyage en Amérique du Sud. Nous ne voulions pas commencer notre nouvelle vie à Montréal par un hiver ;-).

MLBT : Pourquoi avoir choisi le Canada et plus particulièrement Montréal ?

LR : J’étais venu voir des amis il y a quelques années, cela m’avait beaucoup plu.

Partir vivre à l’étranger était un projet de couple et Montréal cumulait pas mal d’avantages en terme de visa, de langue, d’employabilité…

MLBT : Quel est ton visa actuel ? As-tu eu besoin de plusieurs visas pour t’implanter à Montréal ?

Nous avons commencé par un visa PVT (Permis Vacances Travail), puis nous avons enchaîné sur un visa de travail temporaire (Jeune Pro). Nous allons faire une demande de Résidence Permanente incessamment sous peu.

MLBT : Comment gères-tu la différence culturelle au quotidien ?

LR : Très bien, les Québécois sont très sympas. Montréal est une ville très cosmopolite où se mêlent des gens de partout, du coup la mentalité est très bonne, très ouverte.

La vie est agréable, moins agressive, bien moins « dense » à tous les niveaux qu’à Paris.

MLBT : peux-tu nous donner des exemples de cette différence culturelle ?

LR : Le rythme ici est plus « anglo-saxon », les gens dinent plus tôt, vers 18h/19h, et se couchent plus tôt surtout en hiver. C’est finalement assez logique, ils se calent sur le soleil. C’est très différent du rythme espagnol que j’ai pu vivre à Madrid où  là  c’est plutôt ; les gens qui se «cachent » du soleil, ils déjeunent à 14h et dinent après 21h.

Sinon il paraît qu’ici ce sont les filles qui draguent! Intéressant pour les garçons célibataires ;-).

MLBT : Comment gères-tu la différence culturelle dans le milieu du travail ?

LR : Ici les gens sont beaucoup moins dans le conflit qu’en France ce qui est très agréable.  Les français on le « sang plus chaud ». Même sans être énervés nous allons être plus expressifs, avec des intonations, en soufflant, en grognant. Cela peut être vu par un québécois comme un « français râleur » alors que ce n’est pas forcément le cas, il faut faire attention à cet aspect.

MLBT : Quelles ont été ou quelles sont les plus grosses difficultés auxquelles vous avez été confrontés pour immigrer au Canada?

LR : Rien de très grave, mais au moment du renouvellement de notre visa, cela a été compliqué, cela a pris un peu de temps et je n’ai du coup pas pu rentrer pour un événement familial en France car je devais rester sur le territoire canadien en attendant mon nouveau visa.

MLBT : Qu’est-ce que tu aimes le plus dans ta vie actuelle (professionnelle et personnelle) ?

LR : Au niveau personnel : j’aime les loyers pas chers (rapport à Paris) ce qui permet d’avoir un appartement plus grand avec un extérieur et tout cela pour un prix  raisonnable. Montréal est une ville très agréable à vivre. Il y a une vie de quartier sympa, pas mal de bars et de restaurants très cools, de grands parcs au milieu de la ville. Le WE il est facile de s’échapper de la ville (une ou deux heures de route) pour aller voir la nature.

Au niveau professionnel : le marché du travail est plus simple et plus dynamique qu’en France. Attention ce n’est pas pour autant l’Eldorado dont on entend parfois parler…

MLBT : Qu’est-ce qui te manque le plus venant de France ?

LR : Forcément les amis, la famille, puis la Provence, le sud, la méditerranée, le vin pas cher !

MLBT : Comment gères-tu ce(s) manque(s) ?

On ne le gère pas trop mal, on a eu pas mal de visites, nous rentrons assez régulièrement pour les vacances.

MLBT : Comment sont perçus les Français expatriés à Montréal ?

LR : Il y en a beaucoup, de plus en plus, je crois que  les statistiques sont assez impressionnantes. Je pense que les Québécois essayent vraiment de conserver la francophonie, c’est un vrai sujet ici. L’immigration de « francophones» est une bonne chose pour cela. Après les français sont souvent vu comme trop prétentieux, arrogants, qui se croient chez eux, il faut vraiment faire attention à cela. C’est important que les nouveaux arrivants comprennent que le Québec ce n’est pas la France (même si on parle la même langue) et que c’est à nous de nous adapter à la culture québécoise et pas l’inverse.

MLBT : Quels conseils donnerais-tu aux personnes qui souhaitent s’expatrier à Montréal ?

LR : Ne sous estimez jamais tous les sujets de  papiers/visa. Consultez, renseignez-vous, établissez une vraie stratégie pour la suite, assez vite après votre arrivée.

Toujours être rigoureusement honnête avec l’immigration, même avec les plus insignifiantes déclarations de douanes.

Pour la recherche de travail, sortez de chez vous, rencontrez du monde, faites un petit boulot, mettez-vous dans des associations, bougez ! S’il n’y avait qu’un seul à chiffre à garder en tête sachez que 80% des offres d’emplois ne sont pas publiques, donc créez vous votre réseau ! Certaines formation peuvent aider comme par exemple la CITIM qui propose une formation gratuite.

 

De PVTiste à gérant d’un restaurant

Nous rencontrons Jean-Charles Poupot, gérant d’un restaurant « Juliette et Chocolat » sur le Plateau Mont-Royal, à Montréal. Tout d’abord assistant gérant, il a été promu gérant seulement 3 mois après avoir commencé sa mission. Il nous explique son arrivée au Canada.

My Little Big Trip : Bonjour Jean-Charles, peux-tu nous expliquer comment en es-tu arrivé à gérer un « Juliette et Chocolat » à Montréal ?

Jean-Charles Poupot : Pour commencer, il faut savoir que ma compagne est Québécoise. Je l’ai rencontrée il y a trois ans, en janvier 2011. Elle faisait un Permis Vacances Travail (PVT) en France et elle en a profité pour faire le tour de l’Europe. A ce moment-là,  j’étais directeur d’un restaurant à Avoriaz, en Haute-Savoie. Elle a postulé pour être serveuse dans le cadre de son tour d’Europe. On s’est tout de suite plus et on s’est rapidement mis ensemble. Nous avons fait la saison entière à Avoriaz jusqu’au mois d’avril.

De mon côté, j’avais déjà des projets à partir du mois de juin. J’étais supposé faire l’ouverture d’un restaurant à Paris pour des Américains pour lesquels j’avais travaillé lorsque j’étais aux Etats-Unis. C’est un projet sur lequel j’étais depuis 1 an. Concrètement, je devais partir aux Etats-Unis pour 6 mois avant d’ouvrir le restaurant à Paris. Comme je devais rester à Washington pendant les 6 premiers mois et que ma copine était de retour à Montréal, on s’est dit qu’on pourrait se voir au moins un week-end par mois.

A la fin du mois de juin, le CEO de la compagnie pour laquelle je devais ouvrir le restaurant m’appelle pour me dire que le projet tombe à l’eau. En quelques heures, je suis passé d’un plan de carrière tracé à … plus rien du tout. J’ai interprété ça comme un signe et je suis parti à Montréal 3 jour après.

Je suis donc arrivé à Montréal avec un visa touriste. Je n’avais aucune idée des visas dont j’avais besoin pour rester et j’avais en poche un retour pour la France en juillet. J’ai tellement aimé Montréal que j’ai décalé mon billet pour revenir en septembre. Entre temps, j’ai appris qu’on pouvait faire un Permis Vacances Travail. Lorsque je suis reparti en septembre, je planifiais de faire une demande de PVT en octobre. Je suis donc reparti pour faire la demande de France. A ce moment, la demande se faisait encore par courrier et je ne savais pas qu’on pouvait envoyer la demande de l’étranger. Je pensais que les quotas ouvriraient en septembre-octobre alors qu’ils n’ont ouvert en réalité qu’en novembre. J’ai tout de suite envoyé mon dossier et ai reçu mon visa à peine 3 semaines plus tard. Je ne suis cependant reparti qu’en mai 2012 parce qu’entre-temps mon ancien patron m’avait proposé de faire une ouverture de restaurant pour nouvelle saison à Avoriaz.

MLBT : Tu es donc arrivé à Montréal en mai 2012, comment as-tu fait pour trouver un travail ?

J-C Poupot : Je ne suis pas le parfait exemple de la personne qui arrive ici en ne connaissant personne car j’avais ma copine sur place. Elle a une sœur jumelle qui vit dans le même « bloc » qu’elle avec son conjoint, sur le plateau (ancien quartier ouvrier de Montréal, aujourd’hui très prisé par les français). On se voit très souvent et c’est très fun car ils m’ont introduit dans leur cercle : j’ai donc eu des amis dès mon arrivée. En plus, le beau frère de ma copine est réalisateur d’émissions de cuisine, et c’est lui qui a réalisé l’émission « le chocolat selon Juliette ». Il m’a donc mis en contact avec Juliette Brun, qui est la propriétaire des restaurants Juliette et Chocolat. Je suis donc arrivé à Montréal le 9 mai, et le 9 juin je travaillais pour elle.

MLBT : Quel était ton poste quand tu as démarré ?

J-C Poupot : Au départ, je voulais être embauché en tant que gérant mais ils m’ont embauché en tant qu’assistant gérant. Ils m’avaient dit qu’ils ne pouvaient pas me garantir un poste de gérant avant au moins un an. Finalement, on m’a proposé en septembre le poste de gérant de la plus grosse succursale à Montréal.

MLBT : Par rapport à la gestion de Juliette et Chocolat, quel type de personnes recrutes-tu ?

J-C Poupot : On recrute beaucoup d’étudiants locaux. Il y a aussi quelques étudiants Français mais ils ne peuvent pas travailler plus de 20 heures par semaine à cause de leur visa. On est aussi très intéressés par les PVT car ils sont disponibles à temps plein. Le seul problème est qu’une grande majorité d’entre eux sont là pour voyager et ne sont donc pas très fidèles. Ils peuvent décider de partir voyager pendant trois mois et d’une semaine sur l’autre ils ne sont plus disponibles. En fait, il y a deux profils : ceux qui veulent faire le tour du Canada et ceux qui veulent rester au même endroit pendant 6 mois-1an.

MLBT : Comment fais-tu pour savoir s’ils vont rester ou non ?

J-C Poupot : Ça se passe vraiment au feeling. Dans un premier temps je leur demande pour voir leur réaction. Je commence à avoir l’habitude donc je sais plus ou moins s’ils planifient vraiment de rester et ensuite c’est basé sur la confiance. Je gère 50 employés dont un tiers à mi-temps et 2 tiers à temps plein donc on recrute quand même souvent.

MLBT : Tu es amené à manager différentes cultures. As-tu senti une différence dans les méthodes de management?

J-C Poupot : Je suis un restaurateur qui a été formé en France, j’ai géré des brasseries « à la française ». J’ai un tempérament assez chaud que je me suis beaucoup adouci depuis que je suis avec ma copine. Il faut savoir qu’ici, les gens ne sont pas du tout réceptifs à la confrontation et au conflit. Par exemple, j’explique parfois quelque chose et je me rends compte que ça a presque été perçu comme une engueulade alors que c’est juste ma façon de parler. Heureusement, j’ai déjà travaillé aux Etats-Unis, ainsi qu’à Paris dans des entreprises ou tous les employés étaient syndiqués, donc j’ai déjà eu l’habitude d’être plus « doux ». Ici, la restauration n’est pas du tout perçue de la même manière qu’en France. Ici la restauration c’est cool, c’est fun, mais ça n’est pas vraiment perçu comme un vrai travail.

MLBT : Du coup, quelles techniques de management emploies-tu ?

J-C Poupot : Je suis davantage dans l’émotionnel. Ici, dire qu’on est déçu de tel ou tel comportement motive plus les salariés qu’une engueulade. Ensuite, si j’ai quelque chose à leur dire de très important, je les convoque dans mon bureau avec la présence d’un assistant. C’est une habitude que j’ai prise aux États-Unis. Ici, il est toujours préférable qu’une tierce personne soit présente afin qu’il n’y ait pas de quiproquos ou de malentendu.

MLBT : Manages-tu de la même manière les Français et les Québécois?

J-C Poupot : Oui, j’essaye d’être uniforme. Je fonctionne plutôt sur le modèle québécois. J’ai été surpris de voir à quel point les Québécois sont responsables et consciencieux alors que ce sont simplement des étudiants qui ont un petit job. Les Français sont moins impliqués que les Québécois pour ce type de travail.

MLBT : Sur tous les Français qui viennent déposer leur CV, quels sont les profils que tu recherches?

J-C Poupot : Quelqu’un qui vient juste pour 2 mois ne m’intéresse pas parce qu’on a beaucoup de processus et de méthodologie à assimiler dans la préparation des produits. Former quelqu’un coûte cher et n’est pas rentable si la personne ne reste que quelques semaines. Nous visons donc le moyen terme. Il faut rester au moins 6 mois.

J’essaye aussi de choisir des personnes qui ont une expérience dans la restauration ou dans le service à la clientèle. Idéalement, je préfère ceux qui veulent travailler à plein temps et qui sont disponibles en tout temps. Idéalement, ça serait un employé avec aucune contrainte. C’est le rêve de tout restaurateur.

MLBT : Aurais-tu un conseil à donner à ceux qui cherchent un travail de ce type ?

J-C Poupot : Je pense qu’il ne sert à rien d’envoyer des CV, il faut aller les déposer. C’est ce que j’avais fait quand j’étais à Sydney et ça avait été efficace. J’avais acheté quelques guides des restaurants de Sydney et je suis allé les déposer en mains propres. Il est toujours préférable de rencontrer quelqu’un et de lui faire bonne impression, même si ça n’est pas le gérant à qui on a affaire : si le contact est bon, le gérant sera mis au courant.

MLBT : Ressens-tu la crise ici ?

J-C Poupot : Je trouve que ça va un peu au ralenti en ce moment. Par exemple, mon activité est un peu moins bonne que l’année dernière. Je ne pense pas que ça soit une crise économique mais la morosité se ressent dans les habitudes des gens. Plusieurs facteurs jouent sur le moral et les habitudes : le temps, les élections ont un impact sur l’économie. Mon restaurant fait la même taille et me coûte le même prix qu’il soit plein ou vide. Je pense qu’il y a moins de consommation depuis le début de l’année et que le temps y est pour beaucoup. L’année dernière, il a fait -20°C pendant 3 jours alors que là ça a duré un mois.

MLBT : As-tu remarqué des différences culturelles lorsque tu es arrivé ici?

J-C Poupot : J’ai un ami qui vient d’arriver en PVT, il me fait penser à moi il y a deux ans. Il trouve tout facile et tout le monde gentil. C’est vrai que le contact avec les gens est plus facile mais je trouve que la relation de service est moins bonne qu’en France. Par exemple, ici, si tu ne demandes pas de l’aide en magasin, on ne vient pas te demander. Ça me rendait fou au début parce que je suis vraiment sensible à ce genre de choses, mais je m’y suis fait !

MLBT : Est-ce que t’aurais un conseil à donner aux gens qui nous lisent?

J-C Poupot : Je trouve que nous les Français, on est trop communautaristes. Tu ne viens pas dans un pays si c’est pour vivre avec des Français, prendre une colocation entre Français, partir en voyage entre Français. Je pense que si tu veux vivre ton expérience à fond, il faut s’immerger. Je vois souvent des groupes de Français qui viennent manger chez Juliette et Chocolat. Je les entends tout comparer avec la France : « En France c’est comme ceci ou comme cela, en France il y a ceci et pas cela ». Quand j’entends ça j’ai envie de leur dire de lâcher du lest et de ne pas trop rester entre eux.

MLBT : Mais est-ce que les québécois ont envie de se mélanger?

J-C Poupot : C’est sûr que c’est difficile de rentrer dans un cercle d’amis surtout quand tu es d’une autre communauté. Mais je sais que même dans mon réseautage professionnel, je rencontre beaucoup de Québécois. Je fais partie d’une association qui m’a permis de vraiment m’immerger dans le réseau québécois des entrepreneurs.

Autre conseil pour les Français qui arrivent, ne pensez pas que le Québec vous attends et qu’il sera très facile de trouver du travail. Le Québec n’est pas non plus un eldorado. Pour réussir, c’est comme partout, il faut travailler dur et même accepter dans un premier temps de retourner à des postes moins rémunérateurs. Autre chose très importante : ici, c’est VOUS qui avez l’accent, pas eux !

MLBT : Quelle est ta vision de l’immigration au Canada ?

J-C Poupot : Je trouve que c’est relativement simple par rapport à d’autres pays comme les Etats-Unis. Il y a beaucoup de paperasse à faire donc ce n’est pas forcément amusant mais ce n’est pas vraiment compliqué. Actuellement, j’ai le CSQ et je n’ai plus qu’à faire ma demande au fédéral pour pouvoir rester ici et avoir la résidence permanente.

Aurélie : Apprenez à faire votre réseau !

Nous rencontrons Aurélie autour d’un chocolat chaud en plein cœur de Montréal. Voilà maintenant près de 6 ans qu’elle vit à Montréal et elle a bien décidé d’y rester encore un bout de temps. Elle nous fait part de son vécu et des conseils qu’elle donnerait aux nouveaux arrivants.

My Little Big Trip : Bonjour Aurélie, peux-tu nous expliquer pourquoi tu es venue t’installer au Canada ?

Aurélie : Bonjour ! En ce qui me concerne,  j’ai suivi mon copain qui est développeur-programmeur. En 2007, il a eu une opportunité d’emploi à Montréal alors que nous étions encore en France. Il a obtenu un permis de travail fermé pour une start-up dont le concept était la création de vidéos à partir d’un texte qui a été tapé au préalable. Malheureusement, c’est une entreprise qui n’existe plus aujourd’hui mais qui existait depuis 3 ou 4 ans quand mon copain a été embauché.

MLBT : Es-tu arrivée en même temps que lui en 2007 ?

Aurélie : A l’époque, ça faisait tout juste 3 mois que nous étions ensemble et je venais d’accepter un nouveau poste en France. Je travaillais dans le merchandising ce qui était vraiment ce que je voulais faire à l’époque. Sauf que rapidement les circonstances ont fait que je n’étais plus autant attachée à mon travail : j’avais 1h30 de transport et vivre à distance de mon copain me pesait plus que je ne l’aurais imaginé. Les PVT ont ouvert en novembre et j’ai posé ma candidature. Je l’ai eu quelques semaines plus tard, j’ai quitté mon travail à la fin de la période d’essai et je suis arrivée à Montréal en février 2008.

MLBT : Dans quel état d’esprit es-tu arrivée à Montréal ?

Aurélie : Je ne connaissais pas vraiment Montréal, j’étais simplement venue une fois pour un court séjour mais pas assez pour vraiment connaître la ville. Lorsque je suis arrivée, mon copain avait déjà un boulot et un appartement donc ça m’a rassuré. Malgré cela, dès les premiers jours mon objectif était de trouver un travail car je voulais être la plus indépendante possible. J’ai donc commencé à chercher un petit boulot que j’ai trouvé grâce à une agence de placement. Il s’agissait d’un poste en banque en tant qu’assistante. J’ai été très transparente donc ma chef savait que je cherchais un autre travail en marketing et elle a été assez flexible sur mes horaires. Grâce à cela,  j’ai pu passer d’autres entrevues. Au bout de deux mois,  j’ai trouvé un travail dans mon domaine.

MLBT : Et comment as-tu évolué entre ces boulots et celui que tu fais actuellement ?

Aurélie : Pour commencer,  il faut savoir que j’ai quand même changé 5 fois de job en 6 ans !

J’ai commencé par le petit boulot dont je parlais plus tôt pendant deux mois. Ensuite,  j’ai été embauchée chez Reader’s Digest en tant que coordinatrice de campagnes marketing. C’était essentiellement anglophone, ce qui n’était pas évident au départ mais cette expérience a été très formatrice. Grâce à ce poste j’ai rencontré beaucoup de monde, j’ai commencé à avoir des amis etc.

MLBT : Comment as-tu fait pour te faire des amis ?

Aurélie : Dans mon cas, c’était vraiment grâce au  travail. Après, il y a aussi grâce aux amis d’amis. J’avais quand même la chance d’avoir mon copain qui était déjà là, ce qui a aidé. Comme je l’ai disais toute à l’heure, mon but était vraiment d’être indépendante et de me faire mes propres amis. Je fais aussi beaucoup d’activités sportives. A chaque fois que je fais une nouvelle activité je me fais de nouveaux amis.

Même si ce n’est pas spécialement voulu, mes amis sont plutôt des Français. Je ne saurais pas l’expliquer mais parfois j’ai l’impression qu’on s’attire. Je pense que c’est parce qu’on a beaucoup de points communs donc on se lie facilement d’amitié.

MLBT : On entend souvent que même si les Québécois sont faciles d’accès, il est difficile de créer une vraie relation d’amitié. Qu’en penses-tu ?

Aurélie : Je pense que ça prend plus de temps. En ce qui me concerne, ça va faire 6 ans que je vis à Montréal et je commence tout juste à avoir des amis Québécois. Ils ont leur vie et leurs cercles d’amis qui sont déjà construits et c’est vrai qu’ils segmentent beaucoup. Par exemple, si tu les as rencontrés au sport, ils te considèrent comme un ami de sport et ils vont difficilement t’inviter à diner. Disons que ça va prendre environ deux ans pour qu’ils t’invitent à diner. Ils ne vont pas facilement créer les occasions. Culturellement, entre Français, on parle un peu et on va tout de suite proposer de venir diner à la maison. Avec un Québécois, tu vas l’inviter rapidement mais il va refuser longtemps avant de se sentir assez à l’aise pour accepter. C’est différent, il faut s’y habituer.

MLBT : Comment penses-tu que les Français soient perçus ?

Aurélie : Je pense que c’est mitigé. Nous sommes mal vus sur certains points et je le comprends. Parfois, on entend parler des Français dans la rue et on a honte. Certains Français viennent juste d’arriver et comparent tout à la France et c’est quelque chose qui est très mal pris. Nous, quand nous sommes arrivés ici, on ne s’est pas mis à critiquer. Oui il y a des choses qui nous ont étonnées et qu’on n’a pas comprises immédiatement mais on l’a accepté.

L’autre cas concerne les Français qui ne pensent pas à long terme. Ils n’arrivent donc pas à se mettre dans le mode de l’adaptation et de l’intégration du pays.  Pour notre part, nous nous sentons aujourd’hui presque plus chez nous ici qu’en France. Dès que nous sommes arrivés, nous avons vraiment pris la vie ici à pleine main et nous avons créé des opportunités. Nous ne nous sommes jamais dit que nous allions rentrer en France au bout de deux ou trois ans.  Il y a des gens qui sont toujours en retenue car ils se disent que, potentiellement,  ils rentreront en France « bientôt ». De ce fait, ils cherchent moins à se faire des amis, à évoluer, à investir etc.

Mais globalement je trouve qu’on est bien perçus. Il y a des gens qui disent qu’il y a du racisme ici mais moi je ne trouve pas .Je me sens vraiment chez moi. En entreprise, c’est vraiment multi culturel et on se sent plutôt bien intégrés. Je trouve que Montréal est une belle ville pour cela parce qu’on vit bien côte à côte tous ensemble.

MLBT : As-tu remarqué des différences dans le domaine professionnel ?

Aurélie : Je trouve qu’au niveau professionnel, si tu montres que t’es capable et que tu travailles bien, on te donne vraiment ta chance. Il y a une vraie possibilité d’évolution. Une fois qu’on t’a cerné, on va te faire évoluer pour la personne que tu es. En France, on va te mettre dans ta case.

Sinon, je n’ai travaillé que deux ans en France mais je trouve que c’est plus productif ici. Tu arrives à 8h, tu travailles intensément, tu manges devant ton bureau et tu pars à 17h. Pendant tout le temps où tu étais au bureau, tu n’as pas eu le temps de t’ennuyer ou de perdre ton temps. En France, on arrive à 9h, on prend une pause pour le café en arrivant, quelques heures plus tard il y a la pause déjeuner etc. Apres au niveau relationnel, la différence est vraiment au niveau hiérarchique. Par exemple, je peux parler très facilement à la N+2 et elle aussi va facilement venir me parler. Quand je travaillais en France, je ne pouvais pas parler au directeur marketing car ce n’était pas approprié. Ici, tu peux parler à qui tu veux et tout le monde se respecte.

MLBT : Penses-tu que les Français travaillent de façon différente?

Aurélie : Je pense que du fait de notre éducation, nous sommes plutôt des gens de réflexion, des personnes plutôt analytiques. On nous a habitués depuis que nous sommes petits à faire des dissertations à l’école, des études de cas etc. C’est la façon dont nous avons été éduqués. Parfois on me dit que je suis Française à cause de ma façon de réfléchir.

Autre chose, ici on va facilement t’encourager dans les choses positives que tu fais et ça commence dès l’école. Le professeur va facilement te dire que tu fais du bon travail alors qu’en France on va plutôt te casser et te dire que tu pourrais faire mieux. C’est une tendance qui se ressent dans le travail. Je pense qu’en tant que Français, on doit apprendre à faire ça aussi. Il faut être capable de se mettre en valeur si tu veux monter.

MLBT : Comment faut-il faire pour évoluer ?

Aurélie : Je pense qu’il faut vraiment faire preuve d’esprit d’initiative. Il ne faut pas hésiter à demander des augmentations, à changer de poste, à faire évoluer ta description de tâches..etc

En ce qui me concerne, ma clef a été de changer de job pour faire augmenter son salaire et acquérir de l’expérience dans plusieurs domaines. On dit que la durée moyenne d’un job ici est de trois ans. Dans mon cas, je n’ai jamais fait plus de deux ans dans le même job ! J’ai aussi travaillé chez Yves Rocher Amérique du Nord et chez Cossette. Maintenant je suis chez Vidéotron. Mon poste est l’équivalent de chef de produit pour l’offre de télévision. Je pense qu’il ne faut pas hésiter à changer de boulot régulièrement et rester en veille, regarder les offres d’emploi etc.

MLBT : Quels conseils donnerais-tu à un nouvel arrivant pour trouver un travail ?

Aurélie : Je dirais qu’il ne faut pas hésiter à recommencer au début. Je m’explique. J’ai pleins d’amis qui disent : « J’étais ingénieur en France, je veux être ingénieur avec le même niveau de responsabilités et de salaire ici à Montréal. ». Sauf qu’il faut garder en tête que ça prend du temps. Trouver un travail d’ingénieur ici nécessite d’avoir un réseau et c’est ça aussi qui va permettre d’évoluer. Moi j’ai commencé secrétaire et maintenant je suis dans le poste  qui me plaît et répond à mes compétences. Il y a des personnes qui attendent des mois et des mois parce qu’ils n’ont pas été embauchés dans le travail qui correspond exactement à leur compétences. Je pense que trouver un boulot, même si c’est un travail « entre deux » te met dans une dynamique. Ça te permet d’évoluer dans le marché du travail canadien. Il ne faut pas hésiter à prendre un job plus bas que tes compétences sachant que si tu montres que tu as les compétences, tu peux commencer en tant que coordonnateur et terminer au bout de trois à un poste de direction.

MLBT : Comment faut-il faire pour créer son réseau?

Aurélie : Je pense que c’est essentiellement grâce au travail et aux 5 à 7. Je connais ceux de la Jeune Chambre de Commerce de Montréal et quand je suis arrivée, je me suis inscrite dans un  réseau de femmes.  C’était super parce qu’on s’est tellement coachées que même quand on a arrêté le réseau, on a continué de se voir. Mais pour moi ça a vraiment été le fait d’avoir changé 5 fois d’entreprise qui m’a construit mon réseau. Il y a aussi les activités que tu fais à côté. Mais il faut garder en tête que ça se fait petit à petit. Il y a plein de réseaux de tout et n’importe quoi. Il y a aussi les réseaux d’écoles de commerce.

Il est vrai qu’aller dans les 5 à 7, c’est très intense. Il faut absolument faire une carte de visite sinon les gens se demandent pourquoi tu es là. Il faut donner sa carte facilement, et se présenter efficacement en quelques phrases. C’est très naturel pour eux donc il faut se mettre dans ce mode naturel. Je pense que ça prend entre 2-3 ans de se faire un réseau; Et puis il faut entretenir son réseau. Mais je pense que ça se fait naturellement aussi.

MLBT : Quel conseil tu donnerais à quelqu’un qui veut s’installer ici?

Aurélie : En ce qui concerne les visas, dès que tu as envie de rester il faut préparer ta stratégie. Il ne faut pas croire que ça se fait tout seul et qu’on peut repousser ça indéfiniment. Concernant le travail, il ne faut pas hésiter à changer de job et commencer par un travail moins qualifié que tes compétences. Il faut prendre des risques pour monter et garder en tête que si quelque chose te plait plus que ce que tu fais, tu changes. Je trouve que le Canada te donne la possibilité de faire ce que tu as envie de faire. Si tu veux changer de voie et devenir boulanger demain on ne te fermera pas la porte.

Romain : On se sent bien à Montréal !

Nous rencontrons Romain dans le centre-ville de Montréal. Il prend du temps pour nous expliquer comment il en est arrivé à vivre au Canada et en profite pour donner quelques conseils aux nouveaux arrivants.

MLBT : Bonjour Romain, comment en es-tu arrivé à t’installer à Montréal ?

Romain Malenfant : Lorsque j’avais 21 ans, je suis parti au Pérou pendant 1 mois. C’était mon premier grand voyage, en 2007. J’ai rencontré une fille qui habitait à Montréal et j’ai décidé de la rejoindre. Malheureusement, je n’ai pas pu m’installer tout de suite faute de visa. Je suis simplement venu à Montréal pendant 3 semaines pour des vacances et je suis rentré en France en essayant de trouver un moyen pour  revenir au Québec. A l’époque, le PVT n’était pas encore très populaire et je n’en avais jamais entendu parler. Je n’ai pas su trouver l’information sur internet et j’ai finalement décidé de rester en France pour faire une année de licence et de mettre le « projet Montréal » de côté pendant un an.

Entre temps,  j’ai un ami qui a fait un PVT à Vancouver. Il m’a raconté son expérience au Canada. Je m’étais tellement mis dans la tête que j’allais revenir à Montréal que même si je n’étais plus en contact avec la fille, j’ai fait la demande pour le PVT. Mon projet initial était de faire 6 mois à Montréal et 6 mois à Vancouver. Je suis arrivé au Québec en mars 2009.

MLBT : Comment as-tu trouvé ton logement ?

Romain : J’ai cherché un appartement avant de partir. J’ai simplement tapé sur Google « appartements Montréal » et je me suis retrouvé sur le site de l’OFQJ, c’est-à-dire l’Office Franco-Québécois pour la Jeunesse. Il y avait des annonces pour des appartements et une des personnes qui avait déposé une annonce m’a répondu en disant que je pourrais dormir sur son canapé pendant quelques jours. Sauf que juste avant mon arrivée, elle a eu un empêchement. Heureusement, elle a trouvé un couple d’amis qui pouvait m’héberger pendant 3 semaines. Je me suis tellement bien entendu avec eux que je suis resté là-bas pendant 9-10 mois.

MLBT : Donc finalement tu n’es pas allé à Vancouver ?

Romain : Non, finalement j’ai décidé de rester à Montréal. Au bout de 6 mois, je me suis demandé si j’avais envie de recommencer tout ce que j’avais construit dans une nouvelle ville : appartement, travail, amis etc. La réponse fut non ! Je suis quand même allé à Vancouver plus tard, mais seulement pour les vacances.

MLBT : Comment as-tu trouvé ton travail actuel ?

Romain : Je suis allé à l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) en arrivant. J’avais pris rendez-vous avec eux avant de partir. J’ai rencontré une conseillère là-bas et on a discuté de mon projet professionnel. Elle m’a tout de suite conseillé de postuler chez Percy Miller, mon entreprise actuelle. Il se trouve qu’il y avait une fille qui était dans la même promo que moi en France et qui avait des amis qui travaillaient chez Percy Miller. Elle a envoyé mon CV, j’ai reçu un appel rapidement pour un entretien et j’ai eu le poste pour lequel je postulais : Conseiller commercial.

MLBT : Tu as donc été pris dès ton premier envoi de CV ?

Romain : Pas exactement. J’ai bossé dans une entreprise spécialisée dans les inventaires en arrivant. Ce n’est pas le boulot rêvé mais au départ,  je n’ai pas fait le difficile. Percy Miller m’a appelé pour me dire que j’avais le poste seulement une semaine après avoir démarré dans les inventaires.

MLBT : As-tu remarqué une différence culturelle dans le travail ?

Romain : En fait,  je ne suis pas réellement confronté à la culture québécoise dans le travail. Percy Miller a pour marché cible la France et pour cela nous avons besoin d’avoir des commerciaux qui connaissent le  marché français, son environnement, etc… On est une cinquantaine pour zéro québécois. C’est une entreprise assez particulière finalement.

MLBT : Tu fréquentes des Québécois en dehors du travail ?

Romain : Oui, j’ai vécu en collocation avec un Québécois pendant trois ans et demi et un autre pendant un an et demi. Sinon, mes activités extra professionnelles font que je fréquente beaucoup de Français ou de Québécois issus de l’immigration, c’est-à-dire des Québécois dont les parents sont immigrés. Mes centres d’intérêts ne favorisent pas la rencontre avec des Québécois. Par exemple je joue au foot, mais dans une équipe remplie… De Français, Mexicains, Marocains, mais pas ou très peu de Québécois.

MLBT : Selon toi, il y a-t-il des freins à l’intégration ?

Romain : Je pense qu’il peut y avoir des incompréhensions culturelles. Certaines choses peuvent te sembler normales mais être mal perçues ici. Les codes de la société française et québécoise sont complètements différents. On se laisse facilement avoir par le fait que les Québécois parlent français, il est commun de dire que ce sont nos cousins mais ce n’est pas du tout pareil.

Autre chose, il y a de grosses différences dans le relationnel. La plupart des Français trouvent que c’est agréable lorsqu’ils arrivent ici car  les gens sont sympathiques et chaleureux de prime abord. Il est vrai que quand on arrive à Montréal, la nouveauté fait que tout semble génial. Lorsque l’on parle à un Québécois à la caisse ou qu’on demande son chemin, on a tout de suite un « Allo, ça va bien? ». C’est le jour et la nuit par  rapport à la France et c’est vrai qu’au quotidien, c’est agréable. Le problème c’est que si tu veux te faire un ami de la personne super sympa que tu as rencontré en soirée, ça se complique et la distance s’établit.

Il faut aussi garder en tête que nous n’avons pas les mêmes repères. Il est certain que tu auras plus de points communs avec un Français qu’avec un Québécois car les références sont différentes. Nous n’avons pas partagé les mêmes émissions de télé ou dessins animés quand nous étions jeunes.

Dernière chose concernant les différences culturelles ; Il faut savoir que les Québécois sont plus dans l’évitement du conflit. Les relations sont plus consensuelles. Généralement, les Français aiment le débat, ils sont habitués à ça. Ici c’est différent, certains québécois ne vont pas nécessairement te le dire si il n’est pas d’accord avec toi.

MLBT : Te sens-tu intégré ?

Romain : Ca dépend comment tu le vois. En ce qui me concerne, ça fait 4 ans et demi que je suis là. Oui je me considère intégré. J’ai un job, des amis, un appartement. Par contre, je ne fréquente pas énormément de Québecois. La plupart de mes amis sont Français.

MLBT : Sens-tu une différence de traitement parce que tu n’es pas Québécois ?

Romain : Pas vraiment mais je fais toujours attention. Je n’ai jamais senti de racisme envers moi, maintenant je sais pertinemment que nous ne sommes pas appréciés par tout le monde. En tant que Français on a une mauvaise réputation d’arrogants et j’essaye de faire en sorte de ne pas propager cette image. Je garde en tête que je ne suis pas chez moi, je ne suis pas dans mon pays. Je ne suis pas Québécois, je ne suis pas né ici etc. Je ne veux pas que les gens aient des préjugés sur moi à cause de ma nationalité.

MLBT : Pourquoi restes-tu?

Romain : Je reste à Montréal parce qu’ici c’est plus relax. Les gens sont tranquilles et accueillants et la qualité de vie est super. On s’y sent bien. Il s’y passe pleins de choses pendant l’été : festivals, concerts etc.

Quand je demande l’avis des gens autour de moi, ce qui revient souvent c’est qu’ils se sentent bien ici. Et puis, c’est vrai que le fait de ne pas être dans son pays d’origine donne un peu l’impression d’être en vacances,  même si je travaille 40h par semaine.  Il est vrai cependant que cet effet s’estompe avec le temps. Je n’ai jamais autant voyagé que la première année ou je suis arrivé. Pensant que ça ne durerait qu’un an, je profitais de chaque occasion pour sortir de Montréal. Maintenant que je suis installé, je entre dans une routine, je pars moins et la sensation d’être en vacances est moins forte. En tous cas être à Montréal rend plus accessible pas mal de destinations vacances qui seraient hors de prix en partant de la France, et ça c’est génial.

MLBT : As-tu l’impression que le fait de vivre à l’étranger te rend différent ?

Romain : C’est vrai que je me suis fait la réflexion. Je pense que si je rentrais en France,  je ferais plus de choses, par exemple, je partirais plus facilement en weekend end en Europe.

MLBT : Quelle est ta vision de la France?

Romain : Je suis en contact quotidiennement avec la France dans le cadre de mon travail. Ça me permet d’avoir une idée de la situation. J’entends tous les jours que ça va mal. Ensuite, il y a ce que je lis et ce que j’entends autour de moi. Franchement,  ça ne me fait pas rêver. Avec du recul, j’ai l’impression que c’est comme ça depuis toujours. Effectivement, il y a une crise économique mondiale mais je pense que même si ça allait mieux, on se plaindrait toujours autant et on entendrait toujours autant que ça va mal. Quand je rentre en France, je ne ressens pas la crise. Dans ma famille, personne n’a perdu son emploi etc. Je ne dis pas que je ne crois pas à la crise en France. Je pense juste qu’il y a des gens qui vivent des situations bien pires dans d’autres pays et qu’ils ne se plaignent pas autant. C’est un réflexe bien français.

MLBT : As-tu un conseil  à donner aux gens qui auraient envie de s’installer à Montréal ?

Romain : Ne confondez pas vacances et immigration. Il y a une grosse différence entre le fait d’être en vacances et celui de devoir trouver un travail et s’intégrer. Ce n’est pas si difficile mais il y a quelques pièges à éviter. Niveau travail par exemple, il faut être capable de faire des concessions, quitte à ne pas travailler dans sa branche au départ pour se faire une première expérience, très importante au Québec. Ça peut être très mal vécu si en plus la personne avait une situation solide en France et un job qui lui plaisait, dans son domaine.

Et surtout, il faut bien se rendre compte qu’il n’y a personne qui nous attend ici. Il faut bien prendre conscience que les Québécois n’accordent pas d’importance au fait que tu sois là ou pas. On est seuls et on se débrouille, c’est ça le challenge !

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Canada: Une PVTiste devenue Résidente !

Nous rencontrons Joyce Legendre, arrivée à Montréal avec un PVT il y a un peu plus de deux ans et heureuse détentrice de la résidence permanente !

My Little Big Trip : Comment en es-tu venue à t’installer à Montréal ?

Joyce : J’ai fait mes études à Audencia Nantes et dans le cadre de ces études, j’ai beaucoup voyagé. J’ai fait un échange Erasmus au Danemark et  j’ai ensuite fait mon stage de fin d’années en Espagne, où j ai également retrouvé mon conjoint. A l’origine, nous voulions rester à Madrid mais je ne trouvais pas de travail à cause de la crise qui commençait en Espagne. Nous sommes rentrés en France et y sommes restés quelques années avant de commencer à touver la vie parisienne moins agréable et d’avoir à nouveau l’envie de repartir vivre à l’étranger.

MLBT : Qu’est-ce qui vous agaçait ?

Joyce : Moi ça allait mais mon mari en avait assez de la routine. Il ne supportait plus les transports et le temps qu’il passait dans le RER chaque jour. Après réflexion, nous n’avions pas, non plus, envie d’habiter à Paris pour toujours – parce que c’est l’évidence.

MLBT : Comment avez-vous préparé votre projet d’expatriation ?

Joyce : Ça nous a pris du temps car il a fallu monter un projet de zéro. Nous avons vraiment étudié toutes les possibilités, les différents pays. Nos critères étaient les suivants : la facilité à trouver un travail, la possibilité de sortir et la qualité de vie, la nature. La langue n’était pas un frein. Nous avons même envisagé la Chine mais nous voulions aussi faire attention à l’intégration et à la culture. Finalement, notre choix s’est arrêté sur le Canada. Un des éléments déclencheurs a été la facilité d’obtention du PVT.

MLBT : Comment vous êtes-vous renseignés ?

Joyce : Nous avons consulté un grand nombre de forums. Nous voulions être dans une optique plus sereine que « challenge ». En Octobre 2010, nous ne savions toujours pas notre destination  et, après avoir collecté les infos nécessaires, en Novembre, nous avons fait notre demande de PVT pour le Canada.

MLBT : Comment s’est passée votre arrivée au Canada ?

Joyce : En Avril 2011, quand nous sommes arrivés, nous n’étions jamais allé au Canada, et nous n’avions pas choisi quelle serait notre nouvelle ville. Débarqués à Toronto, nous avons parcouru le Québec durant 1 mois.  Dix jours après notre arrivée, nous avons décidé d’aller à Montréal durant quelques jours. ça a été le coup de cœur! Nous nous sommes mis à chercher un appartement et en 2 jours nous avons trouvé notre nouvelle maison!

MLBT : Qu’est-ce qui vous a plu à Montréal ?

Joyce : Le vert ! (rires). Nous avons beaucoup aimé le côté nature de Montréal : les parcs, le Mont-Royal et aussi la présence de l’eau, avec le Saint Laurent. De plus, ici, c’est une ville vivante avec énormément d’activités à faire, en été comme en hiver.

MLBT : Connaissiez-vous des gens avant d’arriver ?

Joyce : Non pas du tout. Nous avons simplement fait nos devoirs avant de partir. On a recherché des gens qu’on pouvait connaitre : Le cousin d’un ami, un ami d’un ami etc.

MLBT : Comment avez-vous réussi à trouver un travail ?

Joyce : Mon mari a trouvé rapidement. Il avait parlé à son chef à Paris de sa volonté de venir à Montréal. Il lui a dit qu’il connaissait quelqu’un qui était là depuis 7 ans. Il est allé déjeuner avec cette personne et 15 jours plus tard,  il avait un job.

Pour moi ça a pris plus de temps. J’ai commencé à chercher en juin en commençant par des petites missions d’intérim. J’ai fini par trouver mon job actuel en mars 2012.

MLBT : Mais ton PVT était d’un an, n’est-ce pas? Comment as-tu fait ?

Joyce : Dans mon année, il restait des permis jeunes professionnels jusqu’en mai donc j’ai décroché le travail en mars et j’ai fait la demande de permis jeune professionnel tout de suite. Il en restait une centaine quand j’ai fait ma demande.

MLBT : Tu nous as dit que tu avais reçu ta résidence permanente il y a peu de temps. Comment avez-vous procédé?

Joyce : Nous avons commencé les procédures dès que nous étions sûrs de rester quelques temps à Montréal, soit 3 mois après notre arrivée.  Nous avions amené tous les papiers de France. On a reçu la résidence en juin dernier donc la procédure entière aura duré 2 ans.

MLBT : Que peux-tu nous dire au niveau des différences culturelles?

Joyce : Je pense qu’ici, la pire erreur que tu puisses faire est de penser que tu es en France. En arrivant ici, j’étais prête à rencontrer une autre culture. Montréal est à 6000 kilomètres de la France donc c’est forcément différent. Quand je rencontrais des personnes, je ne pensais pas à tous les clichés qu’on a en France.

Je pense que le plus difficile au début est de se comprendre. Le vocabulaire et les expressions sont très différents de ce qu’on connait.  Rester ouvert et attentif, comme lorsque l’on apprend une nouvelle langue est une bonne attitude à adopter.

MLBT : A ton avis, quelles sont les différences dans les méthodes de travail? La façon de vivre etc?

Joyce : Dans la façon de travailler, il faut garder en tête qu’ici on est quand même en Amérique du Nord, on est beaucoup dans le dépassement de soi, l’esprit entrepreneur. Ce ne sont pas les diplômes qui attestent de tes compétences, ce sont tes expériences, même s’il y a des échecs dans le parcours. C’est l’énergie et la persévérance qui importe.

Joyce : Dans la façon de vivre, les Québécois sont des gens super positifs qui se posent moins de questions que nous. Ils sont très humbles et ne portent pas de jugement ni sur toi, si sur eux. Ils profitent du moment présent. Ils sont probablement plus heureux. C’est plus difficile pour un Français d’exprimer simplement qu’ils sont heureux. Ici, ils profitent de la vie, ils s’amusent et ça fait partie de la qualité de vie d’être entouré de cette énergie positive.

MLBT : On parle beaucoup du fait qu’on peut trouver un travail facilement mais qu’on peut aussi se faire licencier facilement. Qu’en penses-tu ?

Joyce : C’est vrai que l’on embauche plus facilement. Une ou deux entrevues suffisent pour que l’on te donne ta chance. Il faut prouver que l’on vaut sa place et le droit à l’erreur est plus faible. Si tu ne corresponds pas au poste, ou bien tout autre raison, il est possible de se faire licencier. Les Français vivent cela difficilement, peuvent se remettre en question…Nous n’avons pas l’habitude de cette souplesse dans le monde du travail, cependant une coupure ne signifie pas forcément un problème de compétences. Le mieux est de prendre cela comme une occasion de trouver une nouvelle orientation à sa carrière ou de nouveaux défis. Ici, je connais beaucoup de personnes qui se sont déjà fait licencier ou qui ont quitté leur emploi. Toutes ont retrouvé du travail.

MLBT : As-tu des conseils à donner à ce sujet ?

Joyce : Mon conseil est de savoir rebondir. On m’a beaucoup dit, si la porte ne s’ouvre pas, il faut passer par la fenêtre, puis sous le paillasson! Il faut garder en tête que nous sommes les seuls à pouvoir faire quelque chose pour notre sort et trouver des solutions. Il ne faut pas se décourager. Il faut aussi réunir les bonnes conditions pour réussir son immigration.

MLBT : Quelles sont les bonnes conditions pour réussir son immigration au Canada ?

Joyce : Quand nous sommes arrivés, nous avons tout de suite trouvé un appartement, on a fait les achats qu’il fallait pour bien se préparer à l’hiver, on avait déjà tous les papiers etc. D’autres personnes arrivent ici et décident de baisser leurs coûts en choisissant un appartement loin de tout, en essayant d’économiser au maximum et de ce fait, il est difficile de rencontrer des gens. Il y a beaucoup de gens qui finissent par rentrer car ils n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient. Gérer ses attentes est important pour éviter les frustrations.

MLBT : Est-ce que tu aurais un conseil à donner aux Français qui cherchent un travail au Québec ?

Joyce : Pour être accepté et intégré, il faut être respectueux et comprendre que l’attitude est importante. Le « je parle mieux », « je ne fais pas de fautes d’orthographe », « j’ai fait des meilleures études » etc. ça ne marche pas ici. Il faut apprendre comment ça fonctionne ici et rester humble.

Chercher du travail c’est comme n’importe où ailleurs, sauf que tu ne peux pas compter sur le prestige de ton école. Ce que j’ai aimé ici c’est qu’ils sont plus dans le « faire ». Les Québécois vont plus s’attarder sur tes compétences que sur ton diplôme. Ils vont regarder si tu es débrouillard, si tu as de l’expérience. Les études sont chers et tous ne peuvent pas les prolonger jusqu’à la maitrise. Pour ceux qui souhaitent poursuivre des études, plusieurs voies existent : soit plus tard en même temps que la vie professionnelle, soit cumuler études & emploi, d’autres suivent les cours du soir…. Il y a plus de diversité dans les chemins professionnels.

MLBT : Et concernant les amis?

Joyce : La majorité de nos amis sont Français de multiples origines. J’ai des amis Québécois mais ça prend plus de temps. C’est normal. En France, on n’est pas facilement amis avec des gens qui viennent de s’installer. Je pense que lorsqu’on arrive, il ne faut pas se couper des autres français pour chercher à être qu’avec des Québécois. L’important c’est de se créer un réseau d’amis.

MLBT : Pour finir, as-tu quelques mots à nous dire sur l’hiver québécois ?

Joyce : Quand tu arrives, tout le monde te fait peur en te disant qu’il fait -40C en hiver… mais ça s’est une semaine par mois ! Le conseil que j’aurais à donner est qu’il ne faut pas s’empêcher de sortir parce qu’il fait froid. Il y a plein de choses à faire : du ski, des raquettes etc. Une chose qui peut surprendre c’est que les Québécois ne sortent pas beaucoup en hiver.

MLBT : Pourquoi ? Ils doivent être habitués au froid, non ?

Joyce : Les Québécois sont moins équipés en vêtements d’hiver que nous et n’ont pas la « magie de la neige » que nous avons en tant que Français. Ils démarrent leur voiture à distance, ils arrivent au boulot, ils garent la voiture au parking souterrain, vont directement au bureau, puis rentrent chez eux. Beaucoup d’activités peuvent se faire à l’intérieur. S’il y a à sortir dehors, beaucoup préfèreront rester au chaud!

La seule chose est que l’hiver est parfois un peu long, surtout s’il y a encore des tombées de neige en avril.

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Je voulais vivre de ma passion !

Pierre-Alexandre Goyette est un entrepreneur en série. Après avoir monté sa première entreprise à 20 ans, il a décidé de développer tout un éco-système d’organisations autour de cette première entreprise qui est… Une école de musique ! Il nous raconte son histoire…

MLBT : Bonjour Pierre-Alexandre, nous avons vu inscrit sur ton profil Linkedin « entrepreneur en série »,  peux-tu nous raconter ce que cela signifie et comment?

Pierre-Alexandre Goyette : C’est une longue histoire (rires) ! A l’origine je suis musicien. J’ai commencé à jouer des instruments de musique quand j’avais 6 ans. A 13 ans j’ai participé à un concours de musique avec mon groupe et nous l’avons gagné. Le prix était un enregistrement d’un CD en studio. J’avais 14 ans. J’ai continué d’aller à l’école et après le bac j’ai continué mes études dans la musique. Mon but était de travailler dans ce domaine. Je voulais vivre de ma passion. Après les deux premières années d’études, j’ai choisi un programme d’étude de la musique pendant 3 ans. J’ai tout arrêté au bout d’un an pour monter ma propre école musicale !

MLBT : Tu l’as monté tout seul ?

Pierre-Alexandre : J’ai rencontré mon associé, Jonathan, pendant mes études et mon frère s’est joint au projet. Jonathan voulait aussi monter un studio d’enregistrement et une école de musique. Il y a 10 ans, nous avons décidé de nous associer et de mettre en commun notre vision du projet. On a lancé l’entreprise en 2004. L’année 2003 a été consacrée à la rédaction du plan d’affaires, trouver des financements, des locaux etc.

MLBT : Mais comment avez-vous trouvé les financements ? Vous étiez jeunes, non ?

Pierre-Alexandre : Oui nous étions jeunes et ça ne nous a pas aidé (rires )! Nos parents nous ont soutenus pour l’apport et les banques nous ont fait confiance. En 2004 nous étions en lancement à temps plein, on ne faisait que ça. On était dans une phase de pré-démarrage, c’est-à-dire qu’on cherchait les clients, on embauchait du personnel, on faisait de la publicité etc.

On a aussi rénové tous les locaux nous-mêmes. Nous avons fait approuver les plans par un architecte et par un ingénieur et on a fait les travaux de juillet 2004 à avril 2005 !

MLBT : Comment faisiez-vous pour vivre ?

Pierre-Alexandre : Honnêtement, la première année on ne se versait pas de salaire, on vivait tous ensemble, 7 jours sur 7 et 24h sur 24. On avait aussi un groupe de musique ensemble, ça créé des liens. Et on était jeunes donc c’était fun.

MLBT : A ton avis, quelle est la clef du succès ?

Pierre-Alexandre : Pour moi, ce n’était pas une option de se planter. Ça devait forcément réussir. L’échec n’était pas envisageable du tout. Je pense que c’est ça qui a fait notre force pour toujours continuer malgré les difficultés.

Nous avons donc monté l’école qui est devenue le point de départ et le point central de toute la structure de l’entreprise que nous avons créée.

MLBT : Comment ça ?

Pierre-Alexandre : En fait, nous avons continué notre projet en en développant d’autres. On avait l’école pour tout ce qui concernait l’enseignement et on a créé le studio pour l’enregistrement.

MLBT : Dans quel état d’esprit étiez-vous ?

Pierre-Alexandre : On ressentait une liberté totale avec l’impression de pouvoir monter n’importe quel projet. Donner naissance à une organisation signifie créer des emplois et dans notre cas c’était aussi une communauté de personnes qui se réunissent pour un but commun. Notre mission est de faire passer la culture et la musique dans la vie des gens.

MLBT : Qu’est-ce qu’il s’est passé par la suite ?

Pierre-Alexandre : En 2008-2009, j’ai fait des conférences sur l’entrepreneuriat et j’ai rencontré une amie qui travaillait en tant que consultante en réinsertion professionnelle. J’ai donc oeuvré entre 2009 et 2011 comme consultant en développement d’entreprise et j’ai aussi repris des études d’école de commerce parce que je sentais que j’avais des lacunes.

En 2009 j’avais énormément de projets en même temps et imbriqués les uns dans les autres. J’ai commencé par monter le groupe Lithium qui est une entreprise de gestion.

En parallèle, en 2010, on a vendu le studio d’enregistrement à une coopérative qu’on a co-fondé avec des musiciens du studio. Cela signifie que l’organisation est la propriété de tous ses membres. La coopérative est basée sur 3 missions. Il y a une partie formation en studio, une partie enregistrement et une partie accompagnement et production de spectacles et d’artistes.

En 2011, j’ai terminé la mission avec mon amie dans le développement d’entreprises. Avec mon frère et des associés du groupe Lithium nous avons développé une société qui s’appelle WT Communication. A l’origine, c’est une entreprise que nous avons aidé à se développer car nous étions partenaires à 30%. Avec cette entreprise, nous en avons acheté une autre qui s’appelle le « Guide du Quartier » qui est un équivalent de Pages Jaunes mais à petite échelle.

En 2009, on a aussi fondé un organisme à but non lucratif qui s’appelle la SOBAM. C’est un organisme à vocation philanthropique. Il est toujours en activité aujourd’hui et il est partenaire avec la coopérative et l’école. Le but de la SOBAM est de permettre aux gens à faible revenu d’avoir accès aux bienfaits de l’apprentissage de la musique.

MLBT : C’est impressionnant, combien de personnes sont impliquées ?

Pierre-Alexandre : Nous sommes une quarantaine de personnes en tout.

MLBT : Tu as bientôt 30 ans, quels sont tes objectifs après avoir déjà fait tout cela ?

Pierre-Alexandre : Je suis en train de passer un certificat de leadership organisationnel à HEC Montréal. Je voudrais terminer ça et faire un MBA. Je voudrais me rapprocher davantage du marketing et de la publicité et faire quelque chose de vraiment créatif.

MLBT : Que penses-tu de la main d’œuvre française ?

Pierre-Alexandre : Je pense que c’est une main d’œuvre qualifiée avec un niveau d’éducation très élevé. Les Français ont le goût de l’effort, ce qui est plus rare chez les Québécois qui n’ont pas été habitués à l’autorité et qui sont plutôt épicuriens.

MLBT : A ton avis, est-ce que le PVT serait un frein pour l’embauche d’un candidat ?

Pierre-Alexandre : Je ne pense pas. Pour ma part, j’ai déjà embauché plusieurs PVTistes et j’en ai même aidé certains à obtenir un permis de travail.

MLBT : On a entendu dire qu’au Québec, on pouvait être licencié du jour au lendemain, est-ce vrai ?

Pierre-Alexandre : Généralement il y a une période d’essai de 3 mois. Ici il n’y a pas de CDD ou de CDI, l’équivalent d’un CDI serait un contrat permanent. Si certains sont victimes de licenciement abusif, ils peuvent aller voir la commission des normes du travail.

MLBT : On a aussi entendu que tout se faisait grâce au réseau. Est-ce que tu aurais un conseil à donner par rapport à ça ?

Pierre-Alexandre : Je pense qu’il faut fréquenter les cocktails de réseautages et les 5 à 7 (équivalent en France des afterworks). Je pense notamment à ceux de l’entremetteuse ou de la Jeune Chambre de Commerce de Montréal. Il faut aussi utiliser les réseaux sociaux et ne pas hésiter à se faire référer par quelqu’un d’autre.

Maxence Pezzetta

Le fondateur de Guérilla Web!

Une fois n’est pas coutume, nous avons décidé de commencer cette vague d’interviews Québecoises par des rencontres avec des … Québecois! Louis Philippe Dea a fondé Guérilla Web, une entreprise qui, à l’origine, avait pour but de créer des sites internet. Louis-Philippe accepte de prendre quelques instants pour nous parler du développement de son entreprise et des opportunités de business au Canada.

My Little Big Trip : Bonjour Louis-Philippe, comment en es-tu arrivé à monter ton entreprise ?

Louis-Philippe Dea : Pour ma part, j’ai toujours été intéressé par le web. J’ai commencé à me spécialiser dans ce domaine pendant mes études et j’ai continué dans mes premiers stages et boulots. Après mes études, j’ai donc commencé à travailler en agence web et en parallèle, j’ai construit mon propre site qui s’appelle Ma Revue Web. Après 2 ans, je faisais près de  120 000 visiteurs par mois. Ma Revue Web  traitait d’inspiration graphique, de typographies, de web et de partage de ressources. Je présentais les nouveautés notamment au niveau des templates et ça a très bien marché. En parallèle de mon emploi, j’ai créé Guérilla Web. Je faisais régulièrement des mandats pour de la création et de l’optimisation de sites et un jour j’ai décidé de me lancer. J’ai quitté l’agence dans laquelle je travaillais et j’ai commencé à temps plein dans ma propre entreprise. Ça n’a posé aucun problème à mon employeur dans la mesure où il savait que je ne resterai pas avec lui toute ma carrière puisque j’avais également comme ambition de développer ma propre agence.

MLBT : Donc finalement, quelle est ton activité ?

Louis-Philippe : A l’origine, il s’agissait de création de sites internet mais ça a évolué et aujourd’hui nous ne faisons pas que ça. Nous proposons également des services supplémentaires notamment au niveau design, de stratégies de visibilité, de création d’infolettres, d’aide à la gestion des communautés. Nous avons également une très bonne expertise sur WordPress.

MLBT : Il y a beaucoup d’agences web à Montréal. Qu’est-ce que tu proposes de plus que les autres entreprises ?

Louis-Philippe : Pour commencer, il faut savoir que je crois beaucoup en l’alliance des compétences. C’est à partir de cette valeur que j’ai bâti mon business model. Il faut savoir qu’aujourd’hui, certaines grosses agences à Montréal ont énormément de gros projets. Elles ne peuvent pas toujours tout gérer et font appel à des sous-traitants pour les aider à réaliser leurs projets. Ça fonctionne très bien !

MLBT : Depuis combien de temps as-tu lancé ton entreprise et comment vois-tu l’avenir ?

Louis-Philippe : J’ai démarré l’entreprise en 2008 mais comme je le disais plus tôt, je n’ai pas été à temps plein dessus immédiatement. Aujourd’hui, il semble que ma stratégie marche plutôt bien, je viens d’embaucher deux personnes et j’ai trouvé des locaux pour qu’on puisse travailler tous ensemble dans un même lieu.

MLBT : Félicitations ! Quels sont très critères d’embauche ?

Louis-Philippe : Pour moi c’est  l’énergie, c’est la passion qui est importante. Les compétences sont importantes mais non cruciales. On peut toujours les acquérir par la suite. Alors que la passion ça ne se crée pas. Je veux embaucher une personne qui croit en son travail, qui veut aller toujours plus loin et continuer d’apprendre.

MLBT : Est-ce que tu aurais un conseil à donner aux personnes qui arrivent au Québec et qui cherchent du travail ?

Louis-Philippe : Je pense qu’il est important de construire son réseau. Par exemple, pour quelqu’un qui cherche un emploi dans le web, il faut aller aux 5 à 7. Ce sont des soirées (après le travail) organisées par des associations ou des entreprises. En général, chaque soirée est axée sur un thème particulier. Les professionnels du web y sont régulièrement et c’est vraiment l’idéal pour commencer à rencontrer des gens. Je continue d’y aller pour développer mon réseau professionnel, pour me montrer et discuter avec des personnes qui ont peut-être besoin d’aide. Sinon il y a aussi les réseaux sociaux.

MLBT : On est au Québec, il y a beaucoup de Français qui habitent ici et qui décident de s’expatrier, quel est ton point de vue par rapport à l’embauche de Français ?

Louis-Philippe : Selon mon point de vue, ça ne me pose aucun problème. Comme je le disais plus tôt, si la personne est passionnée, qu’importe qu’elle soit Québécoise ou Française.

MLBT : Est-ce que tu penses qu’un immigré européen peut facilement monter son entreprise ici ?

Louis-Philippe : Je ne connais pas les procédures pour les immigrés mais je sais qu’au Québec, monter son entreprise est plutôt facile par rapport aux procédures à suivre. Tu peux le faire sur internet, tu dois choisir de t’enregistrer ou de t’incorporer.

MLBT : Peut-on avoir des aides du gouvernement lorsque l’on crée sa structure ?

L-P : Je ne sais pas. Pour ma part, je n’en ai jamais profité. Ce que je sais en revanche, c’est qu’il est possible d’avoir des aides si on embauche un salarié étranger. Il faut se renseigner sur les modalités mais ça par exemple, c’est un élément qui me ferait favoriser une candidature à une autre. Évidemment, si une personne me dit que si je l’embauche, je ne paie pas les 6 premiers mois parce que je reçois des subventions et des déductions d’impôts, c’est super pour moi ! Surtout pour une entreprise qui est en train de se créer et de grandir !

 Eugénie Delhaye