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Toutes nos interviews aux Philippines

Les Français de l’étranger témoignent! Dix d’entre eux ont accepté de se confier sur l’expérience philippine! Ils nous parlent de l’expatriation tant sur le plan professionnel que personnel. Cliquez sur les images pour lire les interviews! N’hésitez pas à les commenter!

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r        Maxence Pezzetta

J’ai monté Green Cook!

Jean-Louis Fresnel a monté Green Cook. Il est importateur de produits d’hôtellerie et de restauration de luxe. Son concept : inventer de nouveau concepts culinaires. Il nous reçoit avec sa femme, Eve. Ils nous racontent leur vie aux Philippines.

My Little Big Trip : Bonjour, depuis combien de temps êtes-vous installés aux Philippines?

Jean-Louis Fresnel : On est arrivés en août 2012 avec deux de nos enfants qui ont 12 et 16 ans. Au début ce n’est pas évident pour eux parce qu’ils doivent parler anglais. Maintenant, ils sont conquis et nous aussi. On a même l’impression d’être plus en sécurité qu’en France!

MLBT : Pourquoi ?

Eve : On ressent beaucoup moins d’agressivité. On est aussi beaucoup plus sereins avec nos enfants et plus permissifs. Personnellement, je trouve qu’on était moins tranquilles à Lyon. On y a vécu 15 ans.

MLBT : Nous avons cru comprendre que vous aviez monté une première entreprise en France. De quoi s’agissait-il ?

Jean-Louis : Pour commencer, j’ai participé à pas mal de reprises. J’ai racheté une entreprise qui était grossiste, importateur, et créateur de collections dans l’ameublement et la décoration. On faisait produire aux Philippines. C’est comme ça qu’on a commencé à venir et à connaitre les Philippines.  On travaillait tous les deux dans cette entreprise.

Ce qui m’intéressait dans le projet, c’était le côté créatif, artistique.

MLBT : Pourquoi avez-vous décidé de partir de France?

J-L : Après toutes les péripéties, on est arrivé à Lyon. C’est à ce moment-là que j’ai fait le CPA et que j’avais envie de changer d’air. J’ai monté ma structure et ça a bien marché pendant quelques années. Malheureusement, après la crise, on a déposé le bilan. Je passais plus de temps aux prud’hommes qu’ailleurs. On a fini en redressement judiciaire. En France, dans ces cas-là, on est foutus ! On ne peut plus rien faire, on est fichés à la Banque de France et en plus, à 50 ans, c’est impossible de retrouver du travail !

MLBT : Comment avez-vous fait pour remonter quelque chose à l’autre bout du monde sans argent ?

J-L et Eve : On a revendu la maison et on a monté une autre entreprise à Hong-Kong il y a deux ans. On a fait pas mal d’aller-retours à l’époque.

MLBT : Et comment êtes-vous arrivés aux Philippines ?

Eve : Hong-Kong était trop cher, on ne peut pas vivre là-bas quand on a des enfants. On avait connu les Philippines grâce à notre précédent job et ça nous plaisait d’aller y vivre.

MLBT : Pouvez-vous nous parler un peu de votre société actuelle ?

J-L : Ma société actuelle s’appelle Green CooK. On invente de nouveaux concepts culinaires d’hôtellerie-restauration positionnés haut de gamme . Ça s’est lancé suite à une rencontre avec un ingénieur français qui fait de la caramélisation. Par exemple, on fait de la crème brulée devant les gens. On a également lancé un nouveau concept d’œufs-cocotte. Moi ce que j’aime, c’est bosser sur du conceptuel. C’est exactement ce que je fais aujourd’hui.

C’est un business qui marche très bien aux Philippines et à Hong-Kong. Ça se lance doucement. Je ne veux pas monter mon restaurant. Ça ne m’intéresse pas. Aujourd’hui, je suis sur une niche haut-de-gamme. Si je décide de faire un plat à base de champignons, ça sera de la truffe ou de la morille. Si je fais un foie-gras, ça sera le meilleur foie-gras qui ait été fait en France. Le canard aura été nourri pendant 90 jours et non pas 60 jours comme certains font pour gagner en productivité.

MLBT : Et combien de temps as-tu mis pour lancer ton projet ?

J-L : Il faut compter 2 ou 3 ans. Je commence tout juste à être rentable.

MLBT : Comment on fait pour rencontrer des gens quand on bouge tout le temps ?

J-L : Il faut beaucoup s’investir. Comme on dit, il faut donner pour recevoir. Il faut s’ouvrir. Si on s’ouvre, si on va vers les autres, les choses se passent très bien. D’abord, il faut aller vers les gens et ensuite on fait le tri.

Eve : Ça change en fonction des circonstances. On a vécu deux ans en Martinique, à ce moment-là pour rencontrer des personnes on allait dans les bars. Ensuite on a eu des enfants, j’essayais donc de repérer un enfant qui avait l’air sympa, et ensuite je rencontrais la mère. En général quand l’enfant est sympa, les parents aussi. Si ça se confirmait, j’invitais les parents à diner.

MLBT : Qu’est-ce qui vous plait ou vous déplait aux Philippines ?

Eve : Je trouve formidable le sourire des gens ici ! Et comme je le disais, le sentiment de sécurité est vraiment très présent. En plus, on peut se permettre d’avoir une grande maison avec piscine dans des coins très sympas. On gagne en qualité de vie en vivant aux Philippines. Après, il faut savoir qu’ici, tout est long et prend énormément de temps.

MLBT : Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui se demande s’il va partir ?

Eve : Ça dépend des gens, est-ce que cette personne est seule ? En couple ? Avec des enfants ? En tous cas, il y a des choses passionnantes à voir partout dans le monde. Il faut choisir des contrées qui sont en plein essor pour ne pas se retrouver dans le même contexte qu’en France. De toute façon, quand on n’a pas d’enfants et qu’on n’est pas du genre « pépère », on peut prendre tous les risques ! Nous, aujourd’hui, on considère qu’on donne plus de chances à nos enfants en partant en Asie.

J-L : Quand on est venus ici, on est venus avec un certain capital. Mais la différence avec notre pays, c’est qu’ici, il y a des moyens de faire de l’argent. On a la chance d’être très bien formés et  il y a de la demande. Il y a 6% de croissance! En France, l’ascenseur social est en panne. C’est très difficile de s’enrichir. En plus, on n’est pas du tout protégés quand on est entrepreneur. Nous, s’il n’y avait pas eu la famille d’Eve, on aurait été sous les ponts. Alors que partout ailleurs, si tu connais un échec, on ne considérera pas que tu es mauvais mais que tu as appris.

r       Maxence Pezzetta

Philibert : Il a monté Asia Relocation!

Philibert Challan Belval est passionné par l’Asie. Il a travaillé dans plusieurs pays d’Asie du Sud-Est et a finalement décidé de s’implanter aux Philippines. Pour ce faire, il a monté Asia Relocation : une entreprise qui propose des services de déménagement et d’accompagnement aux expatriés. Il nous parle de son projet et de la culture Philippine.

My Little Big Trip : Bonjour Philibert, comment es-tu arrivé aux Philippines ?

Philibert : Après un échange universitaire et des stages en Asie du Sud-Est, je me suis vu proposer un poste de commercial aux Philippines pour une grande entreprise Française.

Ayant conscience après 6 mois de nombreux problèmes internes a la filiale Philippine, j’ai voulu persévérer et ne me suis pas découragé. Après un an et demi, j’ai décidé de quitter l’entreprise pour me tourner vers de nouvelles expériences plus enrichissantes.

J’ai alors commencé par chercher cette nouvelle opportunité qui pouvait me motiver et m’apporter le challenge dont j’ai besoin. C’est à cette période que j’ai rencontré mon associé actuel qui ayant ouvert son entreprise 8 ans auparavant dans l’immobilier, avait depuis longtemps l’envie de lier Immobilier/Déménagement/Relocalisation.

MLBT : Comment as-tu eu l’opportunité de monter ce business ?

Philibert :J’ai rencontré mon associé actuel lors d’un cocktail/networking, ce genre d’événement est très prisés par les communautés expatriées et sont de bons points de départ pour une recherche d’emploi, de clients, ou de bien d’autres opportunités…

Après lui avoir expliqué mon expérience aux Philippines, il m’a rapidement résumé la sienne et m’a proposé de nous revoir rapidement pour discuter de mon intérêt et mes capacités a démarrer et développer cette structure de déménagement et de relocalisation ensemble. 3 jours plus tard, nous étions d’accord sur le principe et commencions a travailler ensemble sur le projet.

MLBT : Quel est le profil de tes clients ?

Philibert :Je vise principalement les étrangers (de préférence en contrats expatriés) mais nous n’avons pas forcément que ce profil.

MLBT : Comment fait-on pour trouver un travail ici ?

Philibert : Je recommande beaucoup le Networking, les évènements des chambres de commerce et les évènements sportifs de la communauté expatrié.

MLBT : Ça fait combien de temps que tu es lancé ?

Philibert : Ça fait un an et demi. Aujourd’hui on est trois à plein temps, avec un stagiaire pour 4 mois. AsiaRelocation propose de nombreux services. Il y a bien entendu le déménagement mais aussi tout ce qui est administratif/légal, la recherche de logement, les formations, les voitures en leasing, l’intégration/adaptation de l’expatrié et de son conjoint.

MLBT : Pourquoi est-ce que tu vas aussi loin dans la prestation ?

Philibert : Pour pouvoir proposer un package aux entreprises. Les entreprises qui envoient des familles entières dans un autre pays ont besoin que leurs employés s’adaptent mais aussi leur femme et leurs enfants. Si la femme veut partir au bout de 6 mois parce qu’elle n’a rien à faire, qu’elle ne rencontre personne et qu’elle n’a pas le sentiment d’être intégrée, c’est une expatriation ratée.

MLBT : Pourquoi est-ce que tu vas aussi loin dans la prestation ?

Philibert : Pour pouvoir proposer un package aux entreprises. Les entreprises qui envoient des familles entières dans un autre pays ont besoin que leurs employés s’adaptent mais aussi leurs femmes et leurs enfants. Si la femme ne s’adapte pas correctement et veut partir au bout de 6 mois, c’est une expatriation ratée.

MLBT : Vous les assistez pendant combien de temps ?

Philibert : Généralement pendant plus ou moins 1-2 mois après l’arrivée. Évidemment, il n’est pas exclu que nous soyons appelés pour avoir des informations supplémentaires au cours de l’année.

MLBT : Nous avons entendu dire qu’il y a des secteurs où l’entreprise doit être à majorité philippines et d’autres secteurs où ce n’est pas le cas.

Philibert : En effet, en général sans un apport de 200,000 USD la société doit être a majorité Philippine.

MLBT : Quelles sont les procédures à faire au niveau administratif pour être serein quand on monte son entreprise aux Philippines ?

Philibert : Il faut avoir des avocats sérieux et des partenaires de confiance. Apprendre de l’expérience d’autres entrepreneurs dans le pays aide beaucoup.

MLBT : Tu avais conscience de tous les risques en montant ta société ?

Philibert : Oui parce que c’est la même chose dans une grande partie de l’Asie, mais il y a toujours des alternatives.

MLBT : Tu as des concurrents ?

Philibert : Oui, j’ai 7 grands groupes internationaux. Mon avantage compétitif c’est le prix et la qualité du service. Je propose des services à la carte et en « package ». Nous sommes une petite entreprise qui propose un service complet. De nombreux clients ont affaire directement à moi. Pour tout ce qui est recherche de maison ou d’appartement, mon partenaire est parmi les 5 premiers aux Philippines avec sa société HousingInteractive

MLBT : Quelles sont tes ambitions ?

Philibert : Sur la partie immobilier, mon partenaire, a trois sociétés. Il a une plateforme internet, une société aux Philippines et une antenne au Vietnam. Depuis un an et demi, il travaille sur le développement de Housing Interactive dans d’autres pays. Mon objectif est de suivre Housing Interactive dans les pays dans lesquels il est implanté. Bien sûr, dans un premier temps il faut rendre AsiaRelocation profitable aux Philippines.

MLBT : Quel conseil donnerais-tu à une personne qui décide de s’installer ici ?

Philibert : Si elle veut venir en tant qu’employée, je lui conseille de trouver une entreprise avant de partir. Sinon il faut avoir une idée très carrée de ce qu’on veut monter ou avoir une très bonnes connaissances du pays avant de prendre la décision de s’installer ici.

MLBT : Quelle est l’erreur classique que les gens font en arrivant aux Philippines ?

Philibert : Je pense que c’est de rester aux Philippines pour rester aux Philippines. C’est-à-dire qu’ils ne restent pas pour une opportunité professionnelle mais simplement pour rester dans le pays.

 

           Maxence Pezzetta

R. Ferrari : Aux Philippines depuis 43 ans!

Nous rencontrons Roger Ferrari dans son entreprise au cœur de Manille. Ce suisse est implanté aux Philippines depuis plus de 40ans ! Avant cela, il a passé un an en Australie. Il nous fait part de son expérience asiatique et australienne.

MLBT : Bonjour, comment êtes-vous arrivé aux Philippines ?

Roger Ferrari : Tout a commencé en 1968 lorsque j’ai décidé d’aller en Australie par la route. Ça m’a pris 14 mois ! Je suis finalement arrivé à Darwin le 6 juin 1969.

MLBT : Pourquoi aviez-vous décidé d’aller en Australie ?

Roger : A l’époque, on disait qu’on trouverait facilement du travail en Australie. Quand je suis arrivé à Darwin, j’avais l’impression d’avoir atterri sur la Lune ! Je ne comprenais rien. Ils avaient un accent très fort et ils n’articulaient pas ! Mon anglais était un anglais scolaire car j’avais fait une formation d’ingénieur mécanicien mais j’étais parti en voyage directement en sortant de l’école. Je n’avais jamais travaillé. Mon niveau d’anglais suffisait donc pour traverser le monde mais arrivé en Australie, je ne comprenais rien du tout.

MLBT : Comment est-ce que cela s’est passé quand vous êtes arrivé à Darwin ?

Roger : Quand je suis arrivé sur la plage de Darwin, l’endroit était rempli de tentes occupées par des immigrés. A cette époque, on disait que l’Australie était un eldorado. Ils avaient besoin de gens et ils nous disaient que si on venait jusque-là, on nous payait le voyage d’où qu’on vienne ! De ce fait il y a énormément de personnes qui étaient venues mais elles ne trouvaient pas de travail. Comme les immigrés ne trouvaient pas de travail, on leur payait une pension chômage. Ils vivaient donc grâce à ce maigre revenu.

MLBT : Mais pourquoi est-ce qu’on les faisait venir s’ il n’y avait pas de travail ?

Roger : Il y en avait ! C’est simplement qu’il fallait le trouver. C’était la croix et la bannière. Les mecs ne parlant pas anglais, ce n’était pas facile. Dès que je suis arrivé, les autres immigrés m’ont dit que j’étais fou de venir là et que je ne trouverai jamais de travail. Sauf que je n’avais plus un sou ! Il me restait 10 dollars en poche. Ils m’ont dit : « La première chose qu’il faut faire c’est d’aller s’enregistrer au Welfare (équivalent de pôle emploi), comme ça tu auras des sous et après tu reviens sur la plage. »

Pour moi il était hors de question de passer mon temps à attendre sur la plage. Le lendemain je me suis levé tôt. Je suis allé taper à toutes les portes… pas de travail. Je me suis levé aux aurores pendant 3 jours pour trouver du travail. Le 3ème jour, je vois un chantier et je demande du travail. Le chef de chantier avait besoin de quelqu’un pour installer un réseau électrique sur un chantier. J’ai commencé immédiatement après lui avoir parlé.

Au bout de 4 jours, plus de travail. Il m’a payé et voilà c’était fini. Il m’a donné mon chèque et je suis parti. Je découvrais ainsi le monde du travail, un monde que je n’avais jamais connu jusque-là. J’étais très étonné de voir comment ça fonctionnait.

J’ai continué à chercher du travail. J’ai rencontré une autre personne qui m’a dit qu’il y avait un consul suisse. Je l’ai cherché et je suis allé le trouver. Ils avaient un travail pour moi dans l’induction d’eau. Ils avaient un petit atelier et besoin de quelqu’un pour faire le design de tous les équipements. J’ai dû prêter serment sur la bible pour travailler pour le gouvernement !

J’ai commencé à travailler et je bossais à la suisse. Je n’arrêtais pas. J’essayais d’être le plus efficace possible. Je voyais les gens autour de moi qui étaient tranquilles. Ils ne faisaient rien de la journée ! J’ai travaillé 5 mois pour le gouvernement de 8h30 à 16h25 précise. J’étais payé, nourri et logé. C’était royal ! On travaillait en chemise, short et chaussettes blanches.

Un jour ,le chef de bureau nous dit qu’il a besoin de quelqu’un pour faire des heures supplémentaires. Il demande qui est d’accord. Tous les australiens faisaient profil bas alors  j’ai sauté sur l’occasion. Ça me permettait d’avoir de l’argent ! Il me dit, très bien Roger, du restera jusque 18h. Pas de problème. Donc, après 16h25, je reste. J’attends. J’attends. Il ne se passe rien. 17h et toujours rien, 17h30, toujours rien. Donc à 17h30 je vais dans le bureau du chef et je lui demande ce que je dois faire. Il me dit « non c’est bon, tu restes près de ton bureau et quand il sera 18h tu signes là et tu pars ». Je ne comprenais rien. Le lendemain je demande à mes collègues. Ils m’expliquent que le chef a un quota d’heures supplémentaires par mois et que s’il ne l’utilise pas, il perd ses heures. Du coup je suis allé voir le chef et je lui ai dit que ce n’était pas la peine de demander aux autres et que je serai disponible tous les jours !

Ensuite, j’ai décidé de quitter Darwin pour aller passer trois semaines à Sydney. Mon nouvel objectif après était Vancouver. Je suis passé par Manille et j’ai trouvé ça pas mal du tout. C’est là que j’ai rencontré une fille qui travaillait à l’ambassade de France.

MLBT : Comment était vu à l’époque  le fait de partir en backpacker ?

Roger : C’était super ! Mais ça a bien changé. Par exemple, aujourd’hui si on traverse l’Afghanistan, on peut se faire enlever alors qu’à l’époque ça n’arrivait pas. Les gens étaient beaucoup plus dans le partage. On pouvait facilement se faire inviter chez eux que ce soit en Iran, en Malaisie etc. Ce qui était génial c’était que les routards nous donnaient toutes les informations. Par exemple, en Inde, quand on n’avait nulle part où dormir, on pouvait aller dans les temples et ils nous donnaient aussi à manger.

MLBT : Finalement, est-ce que vous êtes allé à Vancouver ?

Roger : Jamais ! Comme je vous le disais? j’ai rencontré cette fille à l’ambassade de France qui m’a présenté à un de ses contacts. Ce dernier m’a proposé un job sur l’île de Palawan. Il s’agissait de gérer une entreprise d’algues. Je n’avais aucune expérience mais il n’arrêtait pas de me dire que ce n’était pas un problème. Il avait juste besoin d’un manager. Il m’a proposé de passer quelques jours là-bas en observation et de me dire ce que j’en pensais. J’ai donc fait un rapport.

Il a trouvé ça extraordinaire ! Il n’en revenait pas. Ça faisait trois ans qu’il avait son affaire et il n’avait jamais eu un seul rapport ! Il a absolument voulu m’embaucher et j’ai accepté. Je suis resté deux ans là-bas et je n’ai jamais quitté les Philippines.

MLBT : C’est génial ! On nous a beaucoup parlé de l’éducation aux Philippines, qu’en pensez-vous ?

Roger : Je pense qu’ici il y a un gros problème d’éducation. Je pense qu’il faut commencer à éduquer les jeunes à l’école parce que les parents ne savent pas. Par exemple, des choses de base comme de jeter les déchets dans la poubelle. Si vous allez aux Philippines et en Indonésie, vous verrez qu’ils jettent tout par terre. Autre exemple, ils ne savent pas traverser une route. Nous c’est une des premières choses qu’on nous apprend. Mais ici ils ne le savent pas parce que personne ne leur a jamais appris. Les automobilistes n’ont aucun respect pour les piétons et inversement.

La personne qui conduit ne s’arrêtera pas pour le piéton. Ici ils s’en fichent et ils passent. Mais moi, si je veux respecter le piéton et que je m’arrête, c’est tout juste si le piéton n’envoie pas un sms devant ma voiture en prenant son temps ! Il n’a aucun respect lui non plus ! Du coup, quand je conduis, je dois faire comme eux sinon je n’avance pas. Mais je pense que tout ça changerait si on commençait à respecter l’autre.

MLBT : On a entendu plusieurs sons de cloche sur les Philippins. Pour certains c’est le paradis et pour d’autres c’est l’enfer. Quel est votre ressenti ?

Roger : Pour moi, c’est un pays adorable, les gens sont charmants ! Mais c’est un pays frustrant parce que c’est un pays qui pourrait faire beaucoup plus. Le philippin est une personne extraordinaire à l’extérieur des Philippines. Il change quand il est dans son pays car il est très affecté par son environnement. Pour vous donner un exemple, si un philippin est aux États-Unis, il conduira très bien. S’il y a un stop, il s’arrêtera. En revanche, s’il est aux Philippines ça n’arrivera jamais. Il y a des philippins dans le monde entier et les gens les adorent Ce sont des bons bosseurs et ils suivent les règles. Par contre, lorsqu’ ils rentrent au pays, ça n’a rien à voir ! Le stop ils s’en fiche, le travail ils s’en fiche, la corruption c’est pareil etc. Ils rentrent dans leur environnement normal et reprennent leurs anciennes habitudes.

MLBT : Mais comment fait-on pour monter sa boite dans ce cas ?

Roger : (rires). Moi j’ai travaillé avec des philippins très bosseurs et très bons au Moyen-Orient et quand ils revenaient au pays, je ne les reconnaissais pas. Ils faisaient n’importe quoi  alors que c’était les mêmes personnes !

On a essayé de comprendre ce qu’il se passait. Pourquoi le même gars change du tout au tout comme cela ? On a compris que c’était à cause de leur environnement, de leur famille. Ils sont très « famille » et sont très affectés par ce qui la concerne. Quand un philippin est au Moyen-Orient, la famille n’est pas présente et  il n’est pas embêté avec les problèmes du quotidien. Quand ils sont ici, les problèmes commencent dès le matin et ils restent préoccupés avec ça toute la journée. Ils ne sont pas à ce qu’ils font parce qu’ils ont la tête ailleurs. De ce fait, ils font n’importe quoi au travail.

MLBT : Et que font-ils pour pallier à cela?

Roger: Ils essayent d’oublier.

MLBT : Comment ?

Roger: Avec l’alcool. Toute leur paie va dans l’alcool le soir après le boulot à la place de payer les factures. Le lendemain, rebelote. En plus ils ont de gros problèmes d’endettement ici. Tout le monde est endetté à tous les niveaux.

MLBT : Pourquoi avoir voulu monter votre entreprise ici plutôt qu’en Suisse ?

Roger : Parce que j’aime ce pays, malgré tous ses problèmes, je suis très attaché à ce pays. J’aime les gens ici. Mais c’est sûr que ce n’est pas toujours facile. Mon staff est bien payé. On essaye de les payer mieux que les autres pour les faire rester.

MLBT : Quelle est votre activité ?

Roger : Je fais du développement de projet. Je représente des sociétés européennes et je fais du conseil pour les aider à s’implanter ou à mettre en place des projets locaux. Je fais du développement de business. J’ai été représentant pour Alstom et aujourd’hui je m’occupe de Thales. Je fais beaucoup de relations publiques, je connais les gens au gouvernement.

MLBT : Quels sont les facteurs clefs de succès pour quelqu’un qui souhaiterait s’implanter ici ?

Roger : Ça dépend du secteur dans lequel vous vous mettez. Je pense que l’un des secteurs porteurs est le tourisme. Moi, si j’étais jeune, je ferais une boutique-hôtel avec une clientèle de très haut niveau, super service, une nourriture de qualité etc.

MLBT : Il n’y a pas de problèmes pour s’installer ici ? On entend souvent dire qu’il y a de grosses différences entre l’officiel et l’officieux…

Roger : Ici tout est négociable. Il faut simplement s’entourer du bon cabinet d’avocats.

MLBT : Comment fait-on pour le trouver ? Comment font les gens qui arrivent ici et qui ne connaissent personnes ?

Roger : Déjà il faut se renseigner auprès des gens qui sont déjà là. Il faut faire comme vous, rencontrer des personnes et aller leur parler, leur demander conseil. Il faut aussi aller aux CCE et à la Chambre de commerce. Il faut passer 3 mois à trouver de l’information et ensuite réfléchir à comment s’implanter.

Par contre moi, si j’avais 25 ans aujourd’hui, j’irais m’installer en Birmanie. Là-bas, tout est à faire. Il y a peu de pays qui sont aussi peu développés en Asie. C’est un pays qui vient de s’ouvrir et qui sera en croissance pendant des années.

MLBT : Si vous receviez un CV avec une année sabbatique et un projet comme My Little Big Trip, qu’est-ce que vous vous diriez ?

Roger : Je me dirais que ce sont des gens qui ont l’esprit d’initiative et qui ont osé prendre des risques. Aujourd’hui il faut innover, il faut savoir prendre des risques, sortir de sa zone de confort. C’est très bien ce que vous faites!

MLBT : Quel conseil donneriez-vous aux gens qui veulent partir mais qui se posent encore des questions ?

Roger : Je leur dirais que d’abord, il faut aller voir. Il faut prendre le risque. Bien sûr, il faut s’adapter en fonction de sa situation familiale. Si on est célibataire ou en couple, il faut y aller ! Avec des enfants, c’est plus compliqué. Mais pour un jeune sans enfant, il faut tenter le coup !

            Maxence Pezzetta

Les Philippines sont un pays d’avenir!

Nous rencontrons Bruno Hirsh à la suite de notre interview avec Eve et Jean-Louis Fresnel. Dès le début de l’interview, il commence à nous parler de la culture philippine. Il faut dire qu’il la connait bien puisqu’il vit là depuis 5 ans, qu’il est marié à une philippine, et qu’il partage sa propre maison avec toute la famille !

My Little Big Trip : On a remarqué qu’ici les gens ont des grosses difficultés à être à l’heure. Comment fais-tu quand tu dois travailler avec eux ?

Bruno : C’est très compliqué, il faut s’habituer ou bien leur faire comprendre que toi, tu fonctionnes différemment. Le problème c’est qu’ils te donnent souvent des excuses. Je connaissais une personne qui était tout le temps en retard, elle me faisait patienter 45 min ou 1h à chaque fois. Je lui ai dit une fois, deux fois, et ensuite j’attendais 10 min et je partais. Elle me rappelait 1h plus tard en me disant qu’elle était là et je lui disais que j’étais parti. Elle m’a refait le coup une ou deux fois et ensuite elle est venue à l’heure. Mais de toute façon c’est à toi de t’adapter. Tu ne peux pas faire ça avec tout le monde.

MLBT : Mais pourquoi font-ils ça ?

Bruno : C’est simple, s’ils ont rendez-vous à 15h, ils considèrent que du moment qu’il n’est pas 15h ils ne sont pas en retard.

MLBT : Oui mais ça fait perdre beaucoup de temps…

Bruno : Oui, vous savez ici ils ont du temps à perdre. Il y a beaucoup de personnes qui sont payées pour faire la queue, ça s’appelle des « runners ».  Ils n’en ont rien à faire que ça prenne une heure ou deux heures puisque c’est leur travail. C’est frustrant de perdre du temps mais il faut savoir passer au-dessus de ça. Tu ne changeras pas les gens et leur manière de vivre. Tant qu’il y aura des gens qui seront payés à attendre, ça n’évoluera pas. Ce sont des frustrations de la vie de tous les jours auxquelles il faut s’adapter sinon ça va vous bouffer.

Malgré tout, il ne faut pas négliger les « runners », ils créent des emplois et sont utiles parce qu’ils te facilitent la vie. Je vous donne un exemple de la vie de tous les jours. Je cherche un cadre pour mes photos. Premier challenge, trouver où se vendent les cadres. Aussi étonnant que ça puisse paraitre, ce n’est pas si évident et à chaque fois que je demande on me répond « je ne sais pas ». En plus, comme on est étrangers, ils vont partir du principe que c’est plus simple de te dire non que de t’expliquer où c’est.

Une fois que j’ai enfin trouvé où acheter les cadres, j’en achète un et je demande au vendeur un clou. Le commerçant n’en vend pas. Je lui demande où je peux en trouver et il me répond… qu’il ne sait pas ! Donc il faut se remettre à chercher un boutique où il y a des clous, redemander à plein de personnes différentes etc. Et c’est toujours comme ça.

Dans ce genre de situation, il ne faut pas laisser aller la frustration. Si ça te frustres, la fois suivante tu t’adaptes et tu envoies ton « runner ».

MLBT : Mais, est-ce qu’il fait vraiment ce que tu as demandé ? Par exemple, si tu lui dis de te ramener un cadre ?

Bruno : Il faut être le plus spécifique possible. Il faut dire que c’est un cadre, préciser la couleur, la taille, le motif, la référence etc. Sinon, il reviendra sans rien parce qu’il n’était pas sûr. Il n’aura pas non plus le réflexe d’appeler pour demander. Ils n’ont pas du tout l’esprit d’initiative, ça n’existe pas ici. Ils ne veulent pas prendre de risques.

MLBT : Lorsqu’on était chez les Fresnel hier on a cru comprendre que tu avais vécu en Californie ? Qu’est-ce que tu y faisais ?

Bruno : Oui, après mes études d’école de commerce, j’ai fait un MBA en Californie et je suis resté y vivre quelques années. Je m’occupais de vendre des produits « gourmets » pour une entreprise qui était en pleine extension. A l’époque, les perspectives de croissance étaient décuplées ce qui provoquait d’énormes opportunités. J’étais dans la Silicon Valley à un moment où Google n’avait que 5 employés ! C’est aussi à cette période que j’ai rencontré ma première femme.

Je suis revenu en France quelques années plus tard et j’ai travaillé plusieurs années en tant que responsable export dans plusieurs entreprises. Quand j’ai quitté ma dernière entreprise, j’ai fait du middle management entre mes clients et mes fournisseurs. Aujourd’hui, je gagne encore de l’argent grâce à ça. En même temps, j’ai monté une société où j’aidais des petites PME à faire de l’export dans les produits de pâtisserie.

MLBT : Comment es-tu arrivé aux Philippines ?

Bruno : Il faut savoir qu’en 2008, j’ai divorcé. Peu après, je suis allé voir un distributeur et un fournisseur à Macao. J’avais rendez-vous avec mon distributeur le soir sauf qu’à la dernière minute, il m’a appelé pour reporter notre rendez-vous au lendemain matin. Je suis allé manger au restaurant français où j’ai rencontré mon épouse actuelle! Elle était serveuse dans ce restaurant où il y avait une majorité de staff philippin. Au début je ne devais y rester qu’une journée et je suis finalement resté pendant 1 semaine. Je suis rentré en France fou amoureux et je faisais l’aller-retour jusqu’à Macao toutes les semaines. Au bout d’un mois et demi, je suis allé voir mon distributeur sur place en lui expliquant que je voulais m’y installer et que je cherchais une entreprise à racheter. Coup de chance, il voulait vendre la sienne. Je l’ai rachetée et je suis allé m’installer à Macao.

MLBT : Qu’est-il advenu de cette entreprise ?

Bruno : Je l’ai revendu car on avait fait une perte de 1 million d’euros en deux ans. Aujourd’hui, je suis consultant pour deux entreprises. Je m’occupe de leur développement export pour le marché asiatique.

Entre temps, après avoir vendu mon business à Macao, j’ai acheté des terrains et j’ai construit des maisons. J’ai monté un projet immobilier de A à Z, j’ai construit et revendu 12 maisons. Ça a duré deux ans et demi.

MLBT : Tu as quand même gagné beaucoup d’argent dans ta vie. Qu’est-ce que tu penses quand tu vois des jeunes comme nous qui ont fait les mêmes études que toi et qui n’arriveront probablement pas à gagner aussi bien leur vie que toi ?

Bruno : Ca dépend de la vie que vous voulez ! Je vais vous raconter une anecdote. Mes potes de lycée me disent : « Quelle chance tu as de mener la vie que tu mènes ». Je leur réponds : « Non, tu ne regardes pas ta vie du bon côté. Moi j’envie ta stabilité ». Ils ont la même vie depuis 15 ans, la même femme, le même travail, le chien, les 6 semaines de vacances. Moi je les envie d’avoir une vie comme ça parce que j’en suis incapable. A cause de mon instabilité, j’ai fait prendre beaucoup de risques à ma famille. J’ai déjà eu des menaces de mort quand j’étais à Macao et j’ai perdu 1 million de dollars avec ma première entreprise. Ça n’a pas été drôle tous les jours et ce n’est pas des choses qui se voient sur les photos Facebook.

MLBT : Comment faire une bonne expatriation ?

Bruno : Je pense que le seul moyen de faire une bonne expatriation, c’est de rompre le cordon ombilical. Sinon tu ne vivras jamais heureux en tant qu’expatrié. Aujourd’hui je ne suis pas présent aux mariages de mes amis, aux baptêmes, aux naissances, aux anniversaires, aux décès. C’est le genre de choses auxquelles il faut se préparer. Pour moi, la seule manière de s’expatrier c’est de s’expatrier de manière brutale. J’ai fait le choix de ne pas fréquenter d’étrangers. J’essaye de m’insérer dans la vie locale le plus possible.

Quand tu fais cela, tu te rends compte qu’il y a plein de choses qu’on imagine françaises mais qui ne le sont pas.

MLBT : Est-ce que tu as des exemples ?

Bruno : Hier quand on était chez les Fresnel, Maxence a dit que la nourriture française et la convivialité liée au repas lui manquaient. En réalité ce n’est pas français du tout. Dans chaque pays où j’ai vécu, je me suis rendu compte que les gens faisaient ça mais d’une manière différente. En France on va s’installer à une table à 13h et on va y rester jusque 18h. Ici on va se mettre autour d’une table et jouer aux cartes pendant toute une nuit voir pendant plusieurs jours ! En plus, les philippins mangent tous le temps, quand ils parlent, qu’ils marchent, quand ils regardent la télé etc. Quoi qu’ils fassent, ils mangent. Ici la nourriture est très importante.

MLBT : Par contre peut-être que la qualité de la nourriture est moins bonne ici, non ? On a remarqué qu’il y avait beaucoup de « mal-bouffe ».

Bruno : Tout d’abord, il ne faut pas oublier que l’armée américaine est restée ici pendant très longtemps. Ça a bien effacé la culture espagnole. Il ne faut également pas oublier qu’il y a aussi la campagne profonde et là-bas on mange des feuilles de bananier, du riz etc.

Il y a énormément de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté. Être capable d’acheter un hamburger à Jolibee (fast-food local), c’est une ascension sociale. Un philippin qui sort de la campagne et qui est capable de s’acheter un burger se dit qu’il monte d’un statut. Pour eux c’est l’ouverture du monde occidental.

MLBT : Comment voient-ils les étrangers ?

Bruno : Les philippins sont beaucoup dans l’acceptation. A l’inverse de nous qui cherchons à comprendre et qui passons notre temps à juger. On a besoin de juger même si ce n’est pas négatif, de savoir ce qui est mieux ou moins bien. Eux jugent beaucoup moins. Ils s’adaptent en essayant de nous faire plaisir. C’est très présent en Asie le « faire-plaisir ». C’est quelque chose qu’on ne connait pas en France.

MLBT : Est-ce que tu aurais un conseil à donner aux gens qui souhaitent partir à l’étranger ?

Bruno : Si j’étais jeune, il est clair que je partirais ! Il y a trois pays que j’envisagerais si j’avais 25-30 ans : les Philippines, le Cambodge et l’Indonésie. Il y a peu de temps, j’ai lu un article qui disait qu’en 2050, les Philippines seraient la 15ème puissance mondiale. C’est donc un pays d’avenir. Ici tout est à faire. En plus c’est relativement simple puisqu’il suffit de dupliquer ce qu’on connait déjà dans les autres pays. Au Cambodge et en Indonésie, c’est le même principe.

Je sais qu’il y a des gens qui restent en France pour la retraite, la sécurité sociale etc. En ce qui me concerne, je n’ai pas tout ça donc ça m’enlève déjà un frein dans ma liberté d’action. Ici, il n’y a pas de sécurité sociale, ça simplifie les choses,  il faut tout payer. Si tu n’as pas d’argent tu n’es pas soigné. Il y a peu, j’ai eu un différend avec la meilleure amie de ma femme. Son mari est mort devant l’hôpital parce qu’elle n’avait pas les moyens de payer et elle n’a pas osé m’appeler. Il est mort d’une occlusion intestinale devant les portes de l’hôpital !

La France a un très beau modèle de santé. Il ne faut surtout pas l’oublier. Le seul souci c’est que les français veulent garder leurs acquis, ils veulent avoir des soins gratuits mais ils ne veulent plus payer. Quand on est aux Philippines, on se rend compte de l’importance et de la qualité de notre système de santé publique.

Maxence Pezzetta

Il a monté deux sociétés aux Philippines!

Nous rencontrons Didier, installé aux Philippines depuis plus de deux ans et qui a déjà 2 entreprises. Les activités de ses entreprises : l’une dans le tourisme, l’autre dans l’évènementiel! Son objectif? Rester libre et indépendant! Il nous fait part de sa vie aux Philippines et de sa stratégie.

My Little Big Trip : Comment est-ce que tu es arrivé aux Philippines ?

Didier : Je suis arrivé à 25 ans, j’étais en troisième année d’école de commerce. Je parrainais une jeune fille et je suis venu lui rendre visite. J’ai beaucoup aimé les Philippines. Je ne me suis pas installé tout de suite. Je suis d’abord revenu en France pour travailler et gagner un peu d’argent. J’étais en alternance à Esmod. Je me suis beaucoup investi, j’ai fait un maximum d’argent et je suis revenu aux Philippines pendant deux ans. J’ai fait pas mal d’aller-retours en France pour travailler parce que la vie aux Philippines coûte assez cher.

MLBT : Pourquoi la vie coute-t-elle si chère?

Didier :  Les Philippines sont un pays très protectionniste, il y a de grosses taxes à l’importation. Le 1er revenu du pays c’est le rapatriement de devises des travailleurs des pays étrangers.

Il y a 3 ans et demi, un de mes anciens camarades d’école de commerce qui travaille à « Terre d’aventure » m’a proposé de monter une agence de voyage pour que je sois son prestataire local. J’avais beaucoup voyagé et j’ai décidé de me lancer.

MLBT : Tu y connaissais quelque chose ?

Didier : Non, ça a été assez compliqué au début. J’ai fait plusieurs erreurs comme me focaliser tout d’abord sur le marché local puis désormais me recentrer sur le marché français, dans lequel j’ai une vraie valeur ajoutée. Aujourd’hui, mon agence se porte très bien et se développe. J’ai de même réalisé tous mes sites internet moi même alors que je n’y connaissais non plus pas grand chose.

MLBT : Comment est-ce que tu as fait ?

Didier : J’ai créé ma boite et me suis lancé sur le marché philippin, avec un site internet qui m’a pris beaucoup trop de temps et était bien trop compliqué à mettre à jour. J’ai perdu des centaines d’heures. Ça n’a pas bien marché car cela me demandait beaucoup trop d’investissement en temps et en argent au niveau marketing. Groupon et d’autres sites similaires se sont lancés en même temps que moi et ça perturbé mes ambitions.

Du coup j’ai décidé de m’attaquer au marché français j’ai lancé le site ilesphilippines.com. Je suis maintenant axé sur du haut de gamme. Je suis maintenant axé sur le sur mesure. Se déplacer aux Philippines est assez compliqué et nos services sont nécessaires si les touristes souhaitent un minimum de confort.

MLBT : Comment fais-tu pour tout organiser parfaitement ?

Didier : C’est très dur ! Il faut que tout soit réglé à la minute et c’est très difficile d’atteindre ce niveau d’organisation avec nos fournisseurs philippins. Il nous faut donc énormément de suivi afin de s’assurer du bon déroulement, ce qui est assez éprouvant. Les Philippines comportent 7107 îles. Elles nécessitent donc de travailler avec de nombreuses personnes différentes.

MLBT : Oui, parce qu’il y a la crise ?

Didier : La crise fait que nos prix ont augmenté de 50% en 2 ans vu que les Philippines sont un pays fermé et qui n’a pas été atteint par cette crise. On a beaucoup de retraités dans nos clients.

MLBT : On a cru comprendre que tu avais plusieurs sites ?

Didier : Oui, en plus du site de tourisme, je lance une agence d’évenementiel. J’organise des soirées d’enterrement de jeunes filles et cela marche très bien.

MLBT : Est-ce qu’on peut venir aux Philippines pour faire de l’argent ?

Didier : Au niveau potentiel business ? Oui je pense, en tous cas, j’espère (rires).

MLBT : Donc tu as monté ta première boite à quelle âge ?

Didier : A 27 ans. Mon objectif est d’avoir de nombreuses entreprises dans différents métiers, d’avoir un éventail le plus large possible. Je ne suis malheureusement pas très patient et j’ai tendance à m’éparpiller facilement. Le plus dur est de monter la 1ère entreprise et de faire ses premiers revenus, c’est 90% des pertes de cheveux.

MLBT : Qu’est-ce qu’il faut savoir quand on monte son entreprise aux Philippines ?

Didier : Il y a une règle aux Philippines. Tu fais ton calcul au niveau du temps et de l’argent que tu vas mettre pour monter ton business et le rendre rentable. Une fois que tu as tes chiffres, tu les multiplies par trois ! Si, une fois que tu as multiplié, tu te rends compte que tu es ric-rac. Il ne faut pas se lancer. Tu ne t’en sortiras pas parce qu’ici tout prend 3 fois plus de temps et, par conséquent, coûte beaucoup plus cher.

En plus, il y a des gros problèmes de compétences ici. On est obligé de tout vérifier. Il y a un gros problème au niveau des embauches et de trouver des salariés valables est un véritable chemin de croix.

MLBT : Comment motives-tu tes salariés alors ?

Didier : J’ai un gros problème à ce niveau-là. Je les paie super bien, je suis cool, peut-être trop car je culpabilise de les payer si peu. Je n’ai pas envie de devenir le manager qui met la pression parce que ça ne me correspond pas.

MLBT : Quelqu’un qui arrive ici, comment il fait pour trouver du travail ?

Didier : 80% des gens trouvent du travail dans les call-centers et dans l’IT où il y a beaucoup d’argent et d’opportunités. J’ai d’ailleurs de nombreux contacts et aide beaucoup de français à trouver du travail. les lecteurs peuvent aussi me contacter s’ils sont intéressés.

MLBT : Mais, pour en revenir à ton affaire d’évènementiel, c’est risqué non puisque tu proposes des strip-teases ?

Didier : Non pas du tout, ce n’est pas une boite de tourisme sexuel ! Je n’embauche que des hommes pour les bachelorettes party, c’est-à-dire les enterrements de vie de jeunes filles. Tous mes « models » sont des blancs et il n y a aucune nudité.

MLBT : Comment as-tu eu cette idée ?

Didier : Il y a 3 ans, j’ai une copine qui m’a appelée parce que c’était l’enterrement de vie de jeune fille de sa sœur. Le strip-teaseur l’avait plantée et elle m’a demandée de l’aider. J’ai fait un remplacement. Finalement j’ai été amené à le faire 2 ou 3 fois pour m’amuser. Et l’année dernière j’ai tenté le lancement d’un site à cet effet et cela a très marché et c’est un très bon complément même si les Philippines ne sont pas encore vraiment prêtes pour ce genre de business.

MLBT : Si tu fais des enterrements de vie de garçons, ça veut dire qu’il va aussi y avoir des strip-teaseuses n’est-ce pas ?

Didier : Oui, je vais faire venir des filles mais ça sera des filles blanches. Je ne veux pas de nudité, pas de photos, et que mes « models » soient ultra-sécurisés. Je ne veux pas travailler avec des philippins car les bars de striptease sont bien trop nombreux et mal famés pour que cela m’intéresse.

MLBT : Comment est-ce que tu trouves les filles blanches ?

Didier : Ça prend du temps, je cherche, je vais bientôt faire de nombreuses annonces en France, États-Unis et Australie. Je dois néanmoins fournir logement et conditions de vies correctes avant de me lancer dans ce rapatriement.

MLBT : Mais, tu n’as jamais de problèmes ?

Didier : Non, là on n’a que des demandes pour des enterrements de vie de jeunes filles. Elles ont de l’argent et quand c’est comme ça, elles sont sophistiquées et très timides donc le travail est très simple.

Et quand on fera travailler des filles, on prendra un garde du corps pour les protéger. C’est une prestation prestige, je ne veux pas qu’il y aient de problèmes pour mes employées.

MLBT : Quel conseil aurais-tu à donner pour travailler avec des philippins ?

Didier : Il faut simplement accepter leur manière de travailler, apprendre la patience et relativiser, se dire que tout le monde travaille comme ça ici. Le problème c’est que ceux qui sont bons partent.

MLBT : Quel conseil tu donnerais à quelqu’un qui décide de partir de la France ?

Didier : Prenez votre temps! Ne lancez pas un business pour lancer un business. Il faut d’abord connaitre et étudier l’idée. Moi j’ai mis deux ans à trouver une idée et maintenant, j’en ai 10 qui m’attendent. J’ai cherché et je me suis conditionné au pays. J’ai acquis une gymnastique mentale pour voir la société différemment. Il faut étudier le pays. Franchement, j’aurai été ruiné si je m’étais lancé directement quand je suis arrivé. J’étais novice, présomptueux, trop enthousiaste et je n’avais pas les connaissances et l’expérience nécessaire.

Aujourd’hui, je sais où je vais, je l’espère en tous cas. Les gens viennent me voir pour me demander des conseils. Là j’ai le cas d’un mec qui avait oublié pas mal de choses dans son business plan. Par exemple la règle de multiplication du temps par trois, l’emplacement etc. Sans préparation, il aurait perdu son investissement en 3 mois. J’utilise mon expérience pour aider d’autres personnes qui souhaitent s’implanter, pour ne pas qu’ils fassent les erreurs classiques.

        Maxence Pezzetta               

Il a monté Paris Délice à Manille

Florian a monté Paris-Délice en plein cœur de Manille. Le concept ? Le croisement entre une boulangerie et une sandwicherie de luxe. L’objectif : Viser la clientèle française mais surtout locale…

My Little Big Trip : Bonjour Florian, tu as monté ton entreprise à l’étranger, plus exactement à Manille, est-ce que tu peux nous en parler ?

Florian : Depuis la crise, il y a beaucoup de jeunes qui arrivent. C’est mon cas. Je viens de Lille, j’ai fait l’ESPEME. Je devais partir en Erasmus et ma directrice m’a proposé de partir aux Philippines. Ils commençaient tout juste les partenariats. J’ai demandé à faire un an pour améliorer mon anglais. Je suis arrivé en 2005 et à l’époque il n’y avait pas du tout de français sur le campus. Sur 15 000 étudiants, on était seulement 5 ! Pendant cette année, j’ai beaucoup plus appris en dehors de l’école qu’à l’école.

Il y avait un de nos très bons potes philippins qui a fait ses études à Angers. Il est maintenant mon partenaire. On a donc monté un projet avec lui et Thibault, mon autre partenaire.

Notre but au départ était d’importer des produits venant des Philippines vers la France. On voulait importer nos meubles designs. Ils ne sont pas très bons en volume ici mais ils sont très très bons en qualité et en design, surtout à Cebu ! On a étudié aussi l’importation des perles mais c’est très compliqué.

Le problème c’est que la crise est tombée à ce moment-là et que les meubles n’avaient pas du tout le même succès. Du coup on a procédé à l’inverse. On a étudié ce qu’on pouvait ramener aux Philippines qui venait de France.

On s’est rendu compte qu’aux Philippines, il y avait beaucoup de mal bouffe. Pour vous donner un exemple, j’ai pris 10 kilos en 1 an (rires). On a aussi constaté que les Philippins commençaient à vouloir changer et faire varier leur alimentation. Surtout les milieux aisés. On s’est donc intéressé à la nourriture française. De ce fait, j’ai contacté une personne d’une chaine de boulangeries en France pour savoir si on pourrait faire un partenariat.

MLBT : Ah bon ? Mais pourquoi la boulangerie ?

Florian : Parce qu’on est français et qu’on voulait faire de la bonne bouffe française. Je suis revenu aux Philippines pendant 6 mois avec un mec de cette boulangerie concurrente que je ne peux pas nommer. A l’époque, le but était de monter cette enseigne aux Philippines en implantant une franchise.

MLBT : Comment procède t-on pour faire une étude de marché aux Philippines ?

Florian : Je suis allé à la mission économique dans un premier temps mais il y avait peu de dossiers concernant la restauration et surtout dans le domaine du pain. Le mieux, est d’aller directement voir les cafés / restaurants et de poser les questions. Pour être aidé par la mission économique il faut avoir une boite en France et venir ici. Le but est d’importer des entreprises françaises à l’étranger. Mais globalement on a les infos par nous-même.

MLBT : Qu’est-ce que tu aurais aimé trouver dans un site comme My Little Big Trip ?

Florian : Déjà, le networking. Quand tu arrives, il faut que tu te fasses un réseau de toutes les nationalités pour avoir différents sons de cloches. Il faut réussir à démêler le vrai du faux.

MLBT : Comment rencontres-tu les gens ?

Florian : Je savais que je voulais une entreprise dans le pain. J’ai donc été dans tous les trucs qui vendent du pain, des sandwichs etc. Je passais dans les restaurants à midi pour savoir à combien ils tournaient. J’ai visité les centres commerciaux pour savoir où m’implanter. Si tu veux monter ton business hors de France, surtout dans des pays en développement, il faut être prêt à prendre des risques monstrueux.

MLBT : C’est possible pour des français de trouver un travail ici ?

Florian : Il y a évidemment des entreprises qui préfèrent employer des français pour l’efficacité et leur diagnostic. Pour un patron français, le but sera de faire progresser son entreprise, même quand ça marche. Alors que pour un patron Philippin, dès que ça marche un peu il se relâche, il part en vacances en laissant les employés tout seuls par exemple. Ce n’est pas facile de trouver ici mais c’est possible.

MLBT : Pourquoi vient-on aux Philippines plutôt qu’ailleurs ?

Florian : Déjà, ici, tout le monde parle anglais, contrairement au Vietnam, au Laos, à la Thaïlande etc. Ici, le droit commercial est américain. Les Philippines c’est aussi une des belles croissances d’Asie du Sud-Est.

MLBT : Pourquoi ?

Florian : Essentiellement grâce à la croissance locale et aux philippins qui travaillent à l’étranger.

MLBT : Ici on cherche à avoir une meilleure qualité de vie ou on cherche à s’enrichir ?

Florian : Tu ne viens pas ici pour la qualité de vie. On est dans une capitale très polluée, stressée, bruyante et avec pleins de maladies. Par contre, hors de Manille, il y a pleins de paysages incroyables. Après, si je suis venu ici c’est pour faire mon trou et pour vivre une expérience incroyable.

MLBT : Pour revenir sur Paris-Délice, c’est quoi ton but ?

Florian : Ça ne s’est pas bien passé avec le concurrent donc je parlais toute à l’heure. Il y avait beaucoup trop de contraintes à monter une franchise pour lui. Donc je me suis mis à bosser pour Class’Croute en France en tant que livreur pendant 1 an. Le but était de voir comment fonctionnait une chaine comme celle-là. Je voulais faire un mix entre Paul qui faisait de la boulangerie et Class’Croute qui faisait des sandwiches haut de gamme.

MLBT : Tu importes de la France ?

Florian : Oui, ça prend un mois à arriver mais j’importe tout congelé. Ça fait environ 6 ou 7 conteneurs par an. C’est pour ça que j’ai étudié le concurrent dont je parlais au début, Class’croute et Paul.

MLBT : A t’entendre on a l’impression que tu connaissais très bien la méthode.

Florian : Quand on monte une entreprise, il faut savoir qu’il faut être prêt à tout. J’ai été livreur après mon école de commerce, j’ai mis plusieurs mois pour trouver un emplacement, je n’avais aucune vie sociale au moment du lancement.

MLBT : C’est quoi ta motivation ?

Florian : Être mon propre patron. Si j’avais monté une franchise comme c’était prévu initialement, l’objectif aurait été de monter 10 restaurants en 9 ans. Par contre j’aurai eu plus de pressions, plus de contraintes, notamment de devoir avoir les prix imposés par la France qui ne connait pas le marché ici.

MLBT : Mais, ça ne coute pas trop cher ?

Florian : Non, pas tant que ça. Je congèle tout, j’ai des grandes chambres froides et le matériel adéquat. Pour réussir, il faut savoir faire un mix entre les goûts français et philippins. Par exemple la mayonnaise française et la mayonnaise philippines n’ont rien à voir. Du coup on a trouvé une mayonnaise japonaise pour qu’elle puisse s’adapter aux deux goûts.

MLBT : C’est impressionnant, tu n’y connaissais rien et tu as quand même réussi à faire tout ça !

Florian : Déjà  j’y suis allé petit à petit en me renseignant auprès des concurrents français. Après j’ai dû me renseigner pour le statut juridique de la société. Ça m’a couté 6 mois de travail. Ici, la majorité des gens ont un prête-nom. Ce n’est pas mon cas.

MLBT : Comment as-tu fait ?

Florian : Il faut aller voir plusieurs avocats et affûter les questions au fur et à mesure. Il faut aller chercher les différents sons de cloches. La mission économique m’a beaucoup aidéau niveau de la structure juridique et l’école dans laquelle j’ai fait mon échange aussi. Il faut aussi aller chercher des infos au SEC qui est la Security Exchange Commission. C’est le FISC ici.

MLBT : Quel est le but de Paris Délice ?

Florian : Attirer les philippins,en faisant découvrir la culture culinaire française à moindre coût.. pas uniquement les français. Par exemple, pour le nom « Paris Délice », on a choisi Paris parce que c’est plus connu que le mot « France ».

MLBT : Quel est le prix de l’immobilier ?

Florian : C’est hors de prix ! Et un prix qui est encore plus affolant, c’est le prix de l’électricité ici ! J’en ai pour 1 300 euros par mois alors que pour la même surface, en France, j’en aurais pour 400 euros.

MLBT : Est-ce que tu arrives à être plus rentable que ce que tu serais en France ?

Florian : Ici, la baguette je la vends 75 pesos. En France c’est moins cher. Aujourd’hui, mon panier moyen est équivalent à mes concurrents en France ! J’ai moins de taxes et moins de frais, moins de coûts de personnel mais un fort coût d’électricité.

MLBT : Comment comptes-tu faire pour la retraite ?

Florian : Déjà, je ne pense pas avoir de retraite, ensuite, je cotise à la CFE et en plus, aux Philippines, il y a une double imposition ce qui fait que, si je paye mes impôts ici, je ne peux plus être imposé en France. C’est un tout petit peu plus avantageux ici.

MLBT : Tu as été soutenu par tes proches en arrivant ici ?

Florian : Par mes proches restés en France, totalement! Par contre sur place, le soutien est limité. Pour moi, le seul moyen de réussir c’est la volonté et le boulot ! Quand je suis arrivé ici, je dormais 3h par nuit.

MLBT : Qu’est-ce qui t’a motivé ?

Florian : Quand il y a un truc qui marche aux Philippines, le business est racheté. Je suis plus dans la création que dans le développement. Il est clair que, dans tous les cas, tu galères pendant 2 ou 3 ans comme partout.

MLBT : Quelle est ta vision de la France ?

Florian : Pour moi, plus tu es en dehors de la France, plus tu en es amoureux. Plus tu vis loin de la France, plus elle te manque. Quand j’entends ma famille qui se plaint, je lui dit d’aller voir ailleurs. Après, le truc typiquement français, c’est de penser que l’herbe est plus verte ailleurs mais ce n’est pas vrai. Je ne suis pas en maillot et collier de fleurs toute l’année. Je galère dans mon boulot, j’ai la pollution, la pauvreté ainsi que la différence culturelle.

MLBT : Nous on a l’impression que tout est lent ici, rien n’est efficace.Qu’en penses-tu?

Florian : Vous n’imaginez pas ce qu’on a vu ici ! On ne t’apprend pas ça à l’école, c’est uniquement du terrain. Ici, si tu veux investir dans le pays et être serein, il faut avoir un visa investisseur. Le capital est censé être bloqué 1 mois. Le mien a été bloqué pendant 7 mois !

J’ai dû faire démonter trois fois les toilettes de mon restaurant pour que ce soit fait correctement. Je n’arrivais pas à m’assoir dessus ! Au bout de plusieurs mois je me suis rendu compte que les ouvriers qui avaient fait les travaux avaient laissé 6 néons allumés 24/24 dans le faux plafond.

En France les difficultés ne sont pas les mêmes.

MLBT : Il n’y a pas de problèmes de racket avec la mafia ?

Florian : Moi j’ai mis 7 mois à ouvrir. Je connais des personnes qui ont mis deux mois parce qu’elles ont décidé de mettre des dessous de table. On a le choix d’être clean ou non. Nous, on n’a pas mis un pesos sous la table et heureusement parce du coup on est moins sollicités.

MLBT : Quelles sont les fausses idées reçues que tu as entendu ?

Florian : Déjà, la liberté par rapport au staff qui est plus libre qu’en France n’est pas vraie. On ne peut pas virer si facilement alors qu’eux peuvent partir du jour au lendemain.

MLBT : Est-ce que c’est dangereux de vivre et de travailler aux Philippines ?

Florian : Oui, ici ils sont très bons en intimidation, pour mettre la pression etc. il ne faut donc pas jouer avec le feu, maintenant quant tu es serieux et que tu fais tout pour t’adapter et te faire adopter par les philippins, il n’y aura pas de problème.

MLBT : Comment fais-tu pour les motiver ?

Florian : Le staff philippin n’est pas simple à manager, la différence de culture entre nos deux pays est forte et la méthode de management est complétement différente. Déjà, il y a beaucoup de boulot donc ils peuvent partir du jour au lendemain. Là je commence à avoir une bonne équipe mais ça fait deux ans que j’y travaille. C’est très dur de tisser la confiance.

MLBT : Malgré tout, tu restes ici ?

Florian : Ici la croissance est conséquente (7% par an), et il est plus facile de se faire son trou sans expérience qu’en France. On est plus vite pris au sérieux.

Malgré les embûches, les contraintes, la majorité des problèmes se résolvent avec le sourire et sous le soleil.

       Maxence Pezzetta       

Cyril Rocke : Directeur de la CCFP

Après avoir été reçu par Mr d’Aboville, nous contactons Cyril Rocke que nous rencontrons quelques jours plus tard entre deux rendez-vous. Cyril Rocke est le directeur de la Chambre de commerce Franco-Philippines. Il nous parle de la culture aux Philippines.

My Little Big Trip : Bonjour, est-ce que vous pouvez nous parler de l’intégration aux Philippines ? Avez-vous ressenti un choc culturel ?

Cyril Rocke : Déjà il faut savoir que j’ai un profil atypique car je suis né au Cambodge et mon père est né au Vietnam. Pour moi, l’Asie n’est pas quelque chose d’exotique. J’ai grandi là-dedans. Être en contact avec des Asiatiques n’a jamais été difficile pour moi. La 2ème chose c’est que lorsque j’ai fait mes études, j’ai fait beaucoup de voyages et de stages à l’étranger. Je suis allé en Inde, en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie. A ce moment, je voulais relier mon passé, mon présent et mon futur. Et comme rien n’arrive par hasard, j’ai travaillé au Crédit Lyonnais à Jakarta, qui m’a ensuite demandé de prendre la direction d’une société nouvellement acquise aux Philippines.

MLBT : Comment ça s’est passé quand vous êtes arrivé aux Philippines ?

Cyril : Mon arrivée aux Philippines n’a pas été dépaysante. Historiquement, c’est un pays de souche maltaise qui a été colonisé par les espagnols et ensuite par les américains avec des influences indiennes et chinoises. Quand vous arrivez ici, quel que soit le pays d’Asie du Sud-Est, il y a tout un tas d’ajustements à faire. Il est très difficile d’appréhender le fonctionnement des gens, avec un regard strictement occidental.

MLBT : Quel a été votre premier choc/étonnement ?

Cyril : C’était de m’adresser à des gens qui parlaient un anglais très américain et quand ils devaient me dire oui, je comprenais un oui occidental. Alors qu’ici, oui ne veut pas dire oui. Même si on parle tous anglais, en réalité, on ne parle pas le même langage.

Par exemple, je vais dans un restaurant dans lequel je vais très fréquemment. Je vois que la serveuse a un chapeau de cowboy et une tenue de western. Je lui demande pourquoi elle est habillée comme ça et elle me répond : « c’est mon uniforme ». Je lui réponds que d’habitude elle n’est pas habillée comme ça et je lui redemande pourquoi. Il a fallu 5 ou 6 questions pour qu’elle me dise que c’était la tenue du jeudi !

Il faut savoir qu’ici, les questions ne sont pas traitées comme en occident. Elles sont traitées de manière contextuelle. Aux Philippines, On n’écoute pas chaque mot, mais le contexte dans lequel on s’exprime: On est content, ou pas, etc… Autre exemple. Je demande à un philippin « peux-tu prendre mon cahier jaune qui est sur mon bureau ». Pour moi c’est très clair. Il me demande quand même si c’est dans mon bureau. Pourtant je lui ai déjà dit. En fait on s’aperçoit que c’est simplement parce qu’il n’a pas écouté chaque mot. Alors que selon moi, j’ai utilisé chaque mot pour donner des informations précises. Du coup, il faut réexpliquer de différentes manières pour être sûr d’être bien compris. La même situation se reproduit tout le temps dans des contextes différents.

MLBT : Est-ce que ce la difficulté à se comprendre peut constituer une raison de départ ?

Cyril : Peut-être, mais, vous savez, nous les français, on est aussi très spéciaux. Si je dis à quelqu’un « Est-ce que vous avez un Iphone ? ». Tu vas répondre par oui ou par non. Alors qu’ici, aux Philippines, c’est mal poli. Un philippin se sentira gêné avec une question binaire, sans contexte. C’est une culture beaucoup plus subtile. Pour un Philippin les questions fermées peuvent  s’apparenter à une situation de conflit.  Il y a donc  plus de non-dit et de sous entendus.

MLBT : Pourquoi ?

Cyril : Parce qu’il y a un risque qu’il perde la face si la réponse n’est pas la bonne. Surtout s’il ne sait pas pourquoi on pose la question.

Les français sont très conflictuels. On veut toujours essayer de connaitre les limites des choses, on veut savoir précisément tout et pourquoi. Les philippins se moquent de nous à ce sujet.

MLBT : Quel conseil vous donneriez à quelqu’un qui décide de venir s’installer ici parce que la vie lui semble « sympa » ?

Cyril : Ça ne veut rien dire . Sympa n’est pas le mot adéquat. Ici, il faut réapprendre un certain nombre de comportements, ce qui sera long et difficile pour la plupart. Malgré tout, on ne cesse jamais d’être un français. Par exemple, j’ai été hospitalisé pour une fracture au talon d’Achille. Pour vérification, je demande une radio. L’infirmière me dit que j’ai une fracture visible. Je demande à voir la radio parce que je n’avais pas du tout mal. Je regarde le document et il est écrit « NO fracture visible » ! Quand je lui ai fait remarquer, elle s’est confondue en excuses. Dans ce genre de situation il ne faut surtout pas se fâcher ni élever la voix. Ce changement de comportement est la chose la plus importante pour un français désirant s’installer ici.

Il faut vraiment garder en tête que les gens ne fonctionnent pas avec la même précision de langage. Il faut se rendre compte que nous, français, on a été formés comme ça. Pas eux. En France, on a une approche conflictuelle, on est bien plus « rentre-dedans ». On est plus facilement dans un rapport de force, ce qui est extrêmement mal vu ici.

Là où nos amis philippins sont très différents c’est dans la vie quotidienne. Ils essayent toujours te faire plaisir, ils ne veulent pas te faire perdre la face. Les relations professionnelles sont beaucoup plus plaisante. Ici, les rapports professionnels ont presque un caractère  familial, il faut s’ attendre  a fêter les anniversaires des employés par exemple. C’est une attente incontournable.

MLBT : C’est important d’adhérer à cette gestion familiale ?

Cyril : On n’a pas le choix.

MLBT : Les gens ne vous voient pas de manière différente lorsque vous vous retrouvez dans un univers plus détendu, plus « privé » ?

Cyril : Il contextualisent. Ils savent que c’est à ce moment-là, ça n’affecte pas du tout le management.

MLBT : Comment on se prépare à venir aux Philippines ?

Cyril : On ne peut pas se préparer en amont. Il faut venir, constater, analyser. Ici, il y a une autre dimension , qui est le cote parfois improvisé et non hiérarchique des rapports. Les rapports d’autorité sont plus diffus et souvent incompréhensibles pour les français  . Il y a parfois un leader naturel mais jamais clairement identifié. Quand je parle à un groupe, je ne donne jamais d’ordres individuels. Je suggère fortement a l’ensemble groupe. J’évite de donner d’ordres directement. C’est jugé trop agressif.

En entreprise, les relations hiérarchiques ne sont pas clairement définies avec des tâches définies. Il faut simplement leur dire ce qu’on veut. Moi, je donne généralement un objectif à atteindre et je laisse mes employés s’organiser. Je repère les leaders naturels et je leur demande si les objectifs sont clairs.

MLBT : Comment motive t-on une équipe ?

Cyril : A la reconnaissance et aussi de l’argent. Mais il y a aussi le fait de créer une atmosphère conviviale. Il faut jouer ce jeu et réussir à faire émerger les leaders. La plupart du temps, les managers ont une culture occidentale plus affirmée. Ça nous permet de communiquer plus facilement.

MLBT : Comment recrutez-vous?

Cyril : On trouve du personnel qualifié assez facilement . Mais a bas niveau de qualification il faut etre tres sélectif et il y a beacoup d’attrition. Après, ça dépend des niveaux. Pour Les cadres qui sont directement sous ma responsabilité, je fais très attention à ce qu’ils parlent le même langage que moi et que nous nous comprenions bien en termes de style de management. Des mots tels que objectifs, profits, intégrité , doivent être compris de la même façon par les deux parties. Il faut vraiment être très à l’écoute pour s’assurer qu’il n’y pas de malentendu.

MLBT : Est-ce qu’il y a un risque à venir vivre ici ?

Cyril : C’est vrai qu’il faut passer un bon moment à s’adapter. Les français qui pensent pouvoir gérer leur entreprise comme en France auront de gros problèmes. Il ne faut pas oublier que les philippins sont très subtils dans leurs rapports sociaux. Ils sont maitres dans la gestion de l’ambiguïté. Nous, on veut toujours que ce soit clair mais on ne peut pas avoir des réponses oui/non ici. Il faut s’adapter a leur méthodes de communication.

MLBT : Donc, venir aux Philippines, ce n’est pas pour tout le monde ?

Cyril : Ce n’est pas si difficile non plus de venir ici. On n’est pas les seuls à être différents. Les autres groupes ethniques, chinois, japonais, indiens, ont aussi leurs difficultés d’adaptation ici. Il faut simplement comprendre qu’on est tous différents et s’adapter.

Mais globalement, ici, c’est quand même plus facile que dans d’autres pays d’Asie.

MLBT : Comment décrieriez-vous les philippins de manière globale ?

Cyril : Ce qui caractérise vraiment les Philippins dans une perspective globale, c’est leur niveau d’anglais élevé et leur culture de la gentillesse, de l’empathie. Ils sont foncièrement gentils dans la relation. Ça c’est une qualité extraordinaire qui fait leur force.

Il faut bien garder à l’esprit qu’on ne parle pas la même langue même si on parle tous les deux anglais ! Dans un passé encore récent, on ne se regardait même pas dans les yeux car c’était assimilé à une agression. Il faut garder à l’esprit que la culture Philippine est l’évitement du conflit et de la violence.

Donc comme il y a cette gentillesse et cette notion de prendre soin de l’autre, pour tout ce qui est qualité de service les philippins sont très recherchés. Ils ne savent pas non plus annoncer les mauvaises nouvelles.

MLBT : Quelle image ont-il des expatriés ?

Cyril : Ici, les étrangers sont les bienvenus, ils sont appréciés. Ce pays à une origine coloniale  espagnole et ils sont ouverts aux étrangers.  Philippin veut dire citoyens du roi d’Espagne, qui s’appelait Philippe II. Ils ont donc une identité mélangée.

MLBT : Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui envisagerait de venir ici?

Cyril :

Je ne dirais pas a tous qu’il faut partir pour monter sa boite. Être entrepreneur ce n’est pas quelque chose qui s’improvise. Si on n’est pas entrepreneur en France, on ne le sera pas non plus . Et ce n’est pas parce qu’un entrepreneur sait faire fonctionner une entreprise en France qu’il saura le faire ici.

Être salarié  aux Philippines, pourquoi pas. C’est un pays porteur mais pas facile. Il faut savoir qu ‘a compétences égales, un français coutera 4 fois plus cher qu’un philippin, et Il faut peut-être donc travailler plutôt pour des entreprises françaises ou des multinationales.

Les philippins ne sont pas fainéants, ils s’investissent et ils peuvent travailler presque toute la nuit si nécessaire. Mais Il faut simplement utiliser les bons leviers de motivation.

En ce qui me concerne, je suis arrivé à un système performant avec des salariés très performants. Mes employés sont en majorité des femmes. Les femmes sont en général plus performantes parce qu’ici les hommes représentent l’enfant roi dans la famille et n’ont pas l’habitude de mettre les mains dans le « cambouis ». Les femmes font le boulot, elles font les choses concrètes et savent  s’organiser. Ici, il n’y a pas d’effet de caste et les femmes ont un rôle important. De plus Il n’y a pas de distinction entre intellectuels et manuels.

     Maxence Pezzetta

Hubert D’Aboville : Président de la CCE

Hubert d’Abobville, président de la Chambre de Commerce Européenne de Manille, nous reçoit dans son immense bureau boisé. Après nous avoir posé quelques questions sur nous, sur notre parcours etc, il commence immédiatement à nous raconter son fabuleux tour du monde qui l’a amené ici, aux Philippines.

Il a décidé de partir aux USA après l’IDRAC, son école de commerce? pour poursuivre ses études et faire un MBA. Parti 3 mois avant le début des cours, il décide de traverser tout le Canada et les États-Unis avant d’aller visiter des universités aux États-Unis. Il décidera finalement d’aller à l’université de Vancouver, au Canada. Après son année de MBA, Hubert d’Aboville rentre en France… en faisant le tour du monde par l’Ouest !

S’ensuit une histoire de plus d’une année pendant laquelle il voyagea de la manière la plus économe possible. Il devient chef d’un petit restaurant sur l’île d’Honolulu, deviendra l’invité spécial du capitaine d’un bateau très luxueux (alors qu’il y est entré en 3ème classe, devant dormir en cale avec les cochon et les volailles). Il traversera la Malaisie en stop. Il rencontrera un prince Népalais, traversera Kaboul en proie aux Russes et sera attendu par une foule en Iran, de l’autre côté de la frontière. Il fera la une des journaux et continuera son voyage modestement jusqu’en Europe. Il arrivera finalement à Paris en 1978.

Quelque temps après être revenu, Hubert d’Aboville et ses frères décident de faire le Paris-Dakar en moto. En tant que diplômé de l’école de commerce, c’est lui qui sera chargé de rechercher des fonds. Un de ses frères qui travaillait à l’époque en Afrique lui dit d’aller rencontrer Bernard Levy ! LE Bernard Henri Levy. Il nous raconte :

« Quand il me reçu ce samedi matin à 8h, je savais que j’avais 20 min. Arrivé dans son bureau, je lui explique mon projet en quelques mots. Il me demande simplement « qu’est-ce que tu as fait dans ta vie ». Je commence à lui expliquer que j’ai fait une école de commerce etc. Il m’interrompt en me disant : « Non mais qu’est-ce que TU as fait ». Je commence donc à lui raconter mon tour du monde… Je suis resté dans son bureau jusqu’à 12h30 !

Il s’avère que Bernard Henri Levy était très intéressé par l’Asie et notamment par les Philippines. A l’époque, il cherchait un patron pour cette zone. Il lui a proposé le poste en lui racontant les 50 prochaines années de ma vie. « Tu commenceras à tel poste puis au bout de 2 ans tu évolueras, au bout de 5 ans tu feras ceci et au bout de 10 ans cela… »

Hubert raconte : « A l’époque je n’avais aucune envie de travailler. Il a beaucoup insisté mais j’ai refusé. Quand je suis sorti de son bureau, j’avais un chèque de 70 000 francs dans les mains pour le Paris-Dakar !!! A l’époque c’était une sacrée somme ! C’était un lingot d’or. En réalité, il avait essayé de m’acheter, je le savais bien. J’ai promis à Mr Levy de revenir le voir après le Paris-Dakar. Il m’a accueilli un samedi matin pendant 3 minutes. Je lui apporte un album photos du Paris-Dakar que je pose sur la table basse (à sa demande). J’avais eu le temps de réfléchir pendant ce trip. Il me demande si j’ai réfléchi, je lui réponds que c’est d’accord. Il me demande ensuite quand je commence et je lui réponds que je dois d’abord aller au Népal et je lui propose de commencer le 1er avril ! Il me tend la main et me dit « 8h ». On était le 24 janvier et je venais de gagner deux mois ! J’étais jeune et inconscient ! »

Hubert d’Aboville nous explique qu’ensuite, tout est allé très vite. Il a fait 1 an de formation avant de devenir patron d’Asie, au bout de 3 ans il était patron de l’ASEA et encore quelques années plus tard il a évolué en Europe où il a installé sa famille. « Quand on est rentrés en France, j’ai dit à ma femme : « Dans deux ans je plaque tout et je monte ma boite aux Philippines ».

Sa femme était Philippine et à l’époque, il faisait 1 mois en Asie, 1 mois en Europe. « Je courrais tout le temps et je ne voyais plus ma famille ». Il donnera finalement sa démission au bout d’un an pour partir monter sa boite aux Philippines, pays dans lequel il vit toujours…

MLBT : Que pouvez-vous nous dire sur les Philippins ?

Hubert : Il faut savoir que ce sont des catholiques. Avec la colonisation de l’Espagne et des États-Unis, ils ont une culture judéo-chrétienne très forte. Ça nous rapproche beaucoup. J’ai trouvé cela très facile. On peut facilement rigoler avec les Philippins. C’est très facile de s’intégrer pour un européen ou un méditerranéen. Je n’ai pas eu de choc culturel.

MLBT : Si vous deviez dire quelque chose à quelqu’un qui veut venir ici ?

Hubert : Je dirais « Mabhouay » ! Ça veut dire bienvenue (précise-t-il devant notre air étonné).

MLBT : Comment se préparer ?

Hubert : Il faut être prêt à l’ouverture et à la compréhension. Il faut être prêt à s’intéresser à leurs mœurs, à leurs habitudes, à s’adapter. C’est aux expatriés de s’adapter au mode de pensée, au mode culinaire, à la différence culturelle etc.

MLBT : Qu’est-ce qu’on trouve ici et que les expatriés n’ont pas trouvé ailleurs ?

Hubert : Il y a 30 ans, quand on partait à l’étranger, on était une poignée d’aventuriers. Aujourd’hui ça n’existe plus beaucoup. Aujourd’hui, les jeunes viennent pour travailler dans des grands groupes ou bien dans l’informatique. Ils rentrent dans un système d’expatriation et bougent tous les trois ans. Il y a de plus en plus de ces profils parce que les entreprises cherchent où on peut investir.

Ici on a 7% de croissance. A titre de comparaison, l’Asie a 5% de croissance. En France, on ne peut rien faire avec nos 0,1% de croissance. Le système est mort. Il n’y a plus aucune prise de risque. Aujourd’hui, les gens vont donner plus de 100% de leurs revenus à l’Etat ! La conséquence c’est que 85% des français soutiennent Depardieu.

MLBT : Quels conseils vous donneriez à des gens comme nous ?

Hubert : Je leur dirais de faire comme vous ! Partez en courant ! Et communiquez sur le fait de partir ! Vous avez tout, vous avez la jeunesse ! Moi, à votre place, je serai devenu révolutionnaire, j’aurais pris les armes. Et aujourd’hui les armes, c’est la communication ! Construisez votre propre monde que ce soit en Belgique, en Afrique du Nord, en Amérique du Nord  ça n’a aucune importance ! Soyez créatifs !

MLBT : Quelles sont les opportunités professionnelles ici aux Philippines ?

Hubert : Elles sont majoritairement dans l’informatique. Si quelqu’un veut trouver du travail ici, il vaut mieux venir directement sur place.

Si j’avais un conseil à donner, je dirais de suivre son bien-être ! C’est ce que j’ai fait toute ma vie. Il ne faut surtout pas aller à contre-courant de ce qui nous apporte du bonheur. La vie passe très vite. Il ne faut surtout pas faire l’inverse de son bien-être sinon c’est la catastrophe ! Ne jamais se laisser influencer par des schémas qu’on essaye de nous imposer sinon, vous serez malheureux toute votre vie.

MLBT : Mais est-ce qu’on ne risque pas d’être des marginaux ?

Hubert : Quand j’ai été recruté par Mr Levy, j’ai été pris sur la base de mon tour du monde. Ça n’avait rien à voir avec mes études. On recrute sur l’énergie qu’on dégage, sur les rêves qu’on veut réaliser et pas sur les études.

Il faut s’éclater dans la vie ! Moi, j’ai 58 ans. Aujourd’hui, je suis dans le 3ème tiers. Je me sens comme à 35 ans. Et on peut s’éclater toute sa vie. Je ne fais que des trucs qui m’éclatent. J’aurais pu gagner beaucoup d’argent en restant dans mon schéma de carrière initial. Faire ce que je voulais faire m’a amené à être directeur de la chambre de commerce européenne !

Quand j’avais 35 ans, j’ai voulu faire le CFA pour me remettre dans un schéma professionnel. J’y suis allé, j’ai eu un entretien, et je me suis fait refouler parce que j’étais trop « atypique » alors que, justement, ce que je voulais c’était me remettre dans un schéma. Finalement, je suis allé à l’INSEAD de Singapour pendant 8 jours. C’était génial ! Et ces crétins de français qui m’ont refusé ! Le mot « atypique » ne m’a jamais arrêté. Pour moi c’est une qualité, ça m’a donné de l’énergie.

Surtout suivez, ne résistez pas au bonheur de ce qu’on a envie de faire ! On n’est pas  là pour s’emmerder ! La vie est tellement courte qu’il faut la croquer à pleines dents ! En faisant ça, vous aurez 100 fois plus qu’en restant dans votre boite à chaussures. Faites 1001 choses ! Il faut se protéger de ces schémas dans lesquels on vous mets avec un chausse-pieds dans une chaussure trop petite ! Vous aurez quelque chose que tous les autres n’ont pas.

Et gardez en tête qu’il n’est jamais trop tard pour sortir de ses chaussures et mettre des tongs ! Et ce, que vous ayez 25, 35, 45 ou 55 ans ! En France on n’est trop coincés. On n’a pas le droit d’avoir peur à 20 ans, vous ne pouvez pas avoir peur à 20 ans, vous n’avancerez pas !

       Maxence Pezzetta